Une révolution biologique ! Vieules, abbé Germain – histoire génétique pédigree d’une famille de haricots. Une révolution biologique ! Par Marc Ways. Mai 2015 de l’Ère Vulgaire.
Une révolution biologique !
VIEULES, ABBÉ GERMAIN
HISTOIRE GÉNÉTIQUE PÉDIGREE D’UNE FAMILLE DE HARICOTS. UNE RÉVOLUTION BIOLGIQUE !
Albi, Imprimerie coopérative du sud-ouest. 1914. In-12°. Broché. Couverture imprimée. 452 pages. Une préface de 229 pages. Une table des matières « tapée ». Curieuse vignette génético-eucharistique reproduite sur les deux plats. Envoi. Dédié à l’éternelle mémoire de Johann Gregor MENDEL, Prieur du couvent d’Altbrünn (Pologne), 1822-1884. Édition originale.
L’Abbé Germain Vieules est Directeur de l’Observatoire de Météorologie Agricole Positive, de l’Institut de Génétique technique et applicative, de la Revue Internationale de Génétique, de la Société scientifique agricole intercontinentale de l’Institut de Génétique, Co-associé de la Société industrielle agricole intercontinentale, de l’Institut de Génétique de Nages (Tarn – France)
Théories mystico-haricologiques sur l’âme et le psychisme des dicotylédones exprimées dans un style à la hauteur de leur métaphysique extravagance.
Quand il vit cet exemplaire, Blavier suggéra d’en publier des extraits illustrés d’images pieuses.
Notice Malombra
« Je vous adore dévotement, ô Dieu immense, vraiment caché sous ces figures haricotaines », s’exclame dès la préface cet abbé positiviste malheureusement ignoré de Blavier (première édition).
Quoique féru par ailleurs de météorologie et de parthénogénèse apide, sa vraie, son exclusive passion fut le haricot ! Exprimées dans un style à la hauteur de leur originalité, ses théories potagères sur l’âme et le psychisme des dicotylédones devaient selon lui « améliorer la destinée terrestre de beaucoup d’êtres vivants, depuis le plus petit microbe jusqu’à l’homme ».
Un Vocabulaire riche d’une cinquantaine de pages recense les très nombreux néologismes créés par l’abbé et qui donnent à ce chef-d’œuvre haricologique une définitive et inimitable saveur.
Quelques bonnes feuilles
« Dès les premiers jours de septembre, nous commençâmes la récolte, chaque gousse étant cueillie mi-mûre et achevant sa maturité à l’ombre dans notre bureau de travail : cela, afin de développer encore la précocitance. Les dix-sept gousses ayant achevé leur maturité, descouscoulhèren, selon le terme occitanien, nous désengoussâmes, nous sortîmes les grains des gousses et les posâmes sur une table en dix-sept rangées dans l’ordre ascendant de la spire haricotaine. Nous voulions nous rendre compte si la place dans la spire n’avait aucune influence sur la coloration des grains. Effectivement, nous remarquâmes certaines choses dont nous parlerons ailleurs…
…Et nous sommes encore payé pour savoir que nos quatre-vingts individus seront têtus, seront de fortes têtes et qu’envers et contre tout, ils phénoméniseront l’idée de leur âme. Bref, nous sommes sûr que ceux qui n’auront pas réussi à se tailler une personnalité dans le monde haricotain en F2, recommenceront avec ardeur en F3 jusqu’à ce qu’ils arrivent au but de leurs désirs, et qu’ils puissent dire à tout mortelles regardant : Voyez donc, je suis un haricot nouveau, un Coco de Nages…
… Car, effectivement, sur la pureté des gamètes et l’allélomorphisme, sur la disjonction et la dominance, sur le mono, le di, le tri et le polyhybride, sur l’épistase et l’hypostase, sur le conditionnement factoriel et la cryptomérie, sur le parallélisme entre l’idiome immatériel ou psychologique et l’idiome sensible ou physiologique, sur la présence ou l’absence idiomatique, sur l’unité mendélienne et la variation variétale, sur tout ce Mendélisme, sur tout le Mendélisme, sur toute la Génétique, l’esprit, la vie, l’âme du vivant plane sublimement comme cet Esprit dont il est parlé au verset second de la Genèse, qui, au commencement, planait sur les eaux et préparait l’éclosion de la vie ici-bas.
Or, comment la vie éclôt-elle ici-bas sinon par la génération ou mieux par la faculté de la génération ou générabilité ?
Et dans quel giron, dans quel sein vivant la vie éclôt-elle sinon dans le sein, dans le circuit de l’espèce ? L’espèce est donc la base du monde vivant et l’espèce sera toujours telle et l’espèce sera espèce tant que la vie sera vie…
…Les quatre-vingts spécimens d’F1 furent soigneusement ensachés et étiquetés en octobre 1910….. L’histoire génétique de celle F1 devenant F2 par le semis – est tellement extraordinaire et curieuse que nous tenons à répéter : 1° F1 provient d’un seul grain hybride RAMISTE : c’est donc la culture pedigree, le pédigrage dans son acception la plus rigoureuse ; 2° les grains avaient tous la même couleur, à savoir : blanc de lait miroitant et noir de jais miroitant environnant le hile avec maquillage de très petits points noirs sur la partie blanche. Que nos lecteurs fixent bien dans leur esprit ces deux remarques.
Le semis eut lieu le 4 mai, en carré spécial, mais sans fumure aucune, car nous ne fumons jamais le haricot, les agronomes comprendront pourquoi, le haricot étant capteur de l’azote atmosphérique.
La levée commença franchement le 16, se développa le 17 et fut effectuée aux trois quarts le 24 mai : le stade semis-levée demanda donc 12 jours et la levée complète prit près de 10 jours. Mais certains grains se montrèrent dès le 15 et la levée fut successive du 15 au 25 : preuve évidente que le nisus précocitanciel fonctionnait déjà. Les spécimens levés le 15 et le 16 reçurent chacun une fiche. Le grain standard de levée que nous désignerons par le symbole F2X reçut deux fiches…
Pour que la plante fabrique une espèce, il suffit qu’elle soit mise à même de phénoméniser les unités mendéliennes – unit-character des Anglo- Yankees – les formes, l’esprit que l’hybridation et la série générationnelle – l’effisme – ont introduits dans son âme ….. Par exemple, le haricot hybride spiraliste cesse, dès F2, c’est-à-dire dès que l’âme est arrivée à la période de ségrégation idiomatique … , le haricot spiraliste cesse, dès F2, de vouloir spiraliser tous ses enfants : dès F2, le haricot spiraliste fabrique des haricots qui ne spiralisent pas, des haricots nains.
C’est une espèce nouvelle. Que personne n’ose dire non, car Darwin n’en demandait pas tant pour donner l’investiture spécifique à une légère variation : si le cas qui nous occupe était arrivé à Darwin, nul doute que l’illustre naturaliste anglais n’eût écrit un ouvrage ayant pour titre : L’Origine des espèces démontrée expérimentalement. La vérité eût été, par ce livre, non seulement mise dans le puits, mais encore totalement étranglée ….. et on aurait vu les raisonnements des transformistes de 1914, De Lanessan en tête ! Heureusement que notre Coco, tout en étant certainement avant la naissance de Darwin, n’a pas eu l’idée d’originer des espèces (?!) du vivant de ce grand Anglais, et a fait cela chez nous qui n’avons nulle intention de l’accuser de ce qu’il n’a pas commis…
…Si, il y a deux ans, en présence des quatre-vingts grains, tous absolument blancs-noirs pointillés, nous eussions dit à un homme :
« Voyez-vous ces quatre-vingts grains : ils sont les enfants d’un seul grain hybride. Remarquez bien comme ils se ressemblent tous. Dans deux ans, nous aurons quinze yariétés, nanistes, ramistes, blanches, noires, bicolores, pointillées, havanes, grises, bleues … , des gousses plates … », cet homme eût hoché la tête et fût resté incrédule. Et cependant, n’est-ce point la réalité ? 1913, F4 va achever de le prouver.
Génétisons donc : continuons la poésie de la vie…
… A notre sens toujours, notre Coco naniste est un rameau détaché de l’arbre vital, le Coco ramiste : c’est une faculté, une potentialité de l’âme haricotaine qui prédomine, fait bande à part, mais ce n’est pas toute l’âme haricotaine de notre Coco. En sorte que, à notre sens toujours, notre Coco naniste, s’il possède l’élan vital et phénoménisateur d’idiome arrivant à une variété dans la variété déjà créée, n’a plus le nisus de la création d’un nouvel ordre, d’une nouvelle tribu de variétés qui réside toujours dans l’arbre vital, dans notre Coco ramiste.
Que transcendantalement, abstractive et in se, on puisse gloser là-dessus, nous n’en disconvenons pas. Mais il est certain que concrètement, practice et in facto, c’est la réalité.
Notre Coco naniste, n’ayant plus l’âme ramiste, qu’il a abandonnée par le fait même de son existence, ne peut être créateur d’un nouveau genre de variété coco… , le ramiste, au contraire, pouvant créer une nouvelle catégorie variétale jusqu’à épuisement complet des formes ou combinaisons spirituelles fusionnées et mises en jeu créationnel par la conjugaison des sèves ancestrales. Ceci a une très haute portée génétique : car, c’est, d’un côté, l’indication de la route à suivre pour le génétiste créateur de variétés aristogénétiques, qui devra toujours s’adresser à un arbre vital, à une âme complète, et non à un rameau vital, à une âme partagée, à une âme particulière détachée depuis longtemps ou même récemment de l’âme complète, de l’âme totale ; car, c’est, d’un autre côté, l’explication de la dégénérescence des types obtenus par semis de graines de vieilles variétés, par exemple : de variétés ampélidéennes, ainsi que l’américain Munson l’a remarqué…
…Dans notre Coco, nous avons trois générations actives, phénoménisatrices, parturiantes.
Un simple coup d’œil jeté sur le tableau schématique des variétés d’F4 suffit pour indiquer au lecteur la valeur créatrice de chaque F…
… Il semble que la génétisance ne soit pas encore finie : car, en F4, il nous a été facile de constater que la plante s’essayait encore à autre chose… En tout cas, au point de vue pratique, le résultat déjà obtenu est simplement merveilleux. Il ouvre à la science et au progrès de l’agriculture des horizons insoupçonnés. A ce point de vue, l’Histoire génétique pedigree d’une famille de Haricots contient dans ses pages une révolution biologique capable d’améliorer la destinée terrestre de beaucoup d’êtres yivants, depuis la muscédinée, l’algue et le champignon, depuis le plus petit microbe jusqu’à l’homme ».
Nages, 15 juin 1914
Blavier, Les Fous littéraires, pp. 911-912.
Malombra, Hétéroclites et fous littéraires, 421.
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