Georges de la Morinais. Les photographies d’esprits. Article parut dans la revue « Le Monde invisible », (Paris), 1899, pp. 55-56.
Georges de la Morinais était un médecin, catholique, ayant participé à la « Revue Le Monde invisible», créée et dirigé par Mgr Elie Méric.
Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original. – Par commodité nous avons renvoyé la note originale de bas de page en fin d’article. – Les images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr
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LES PHOTOGRAPHIES D’ESPRITS
L‘esprit est invisible parce qu’il est immatériel, et c’est une prétention risible que de vouloir le rendre sensible, palpable, comme ont fait les spirites et les occultistes. Leur objectif déclaré, on le sait, est de défendre le spiritualisme : c’est un leurre. Ils n’ont qu’un but, celui de le ruiner par l’exagération, l’absurde et le ridicule. La science n’a rien à voir avec les aberrations de ces faux savants, de ces philosophes à rebours.
Comment admettre un instant que l’esprit devienne plus ou moins matériel pour être saisi par les sens ou par la plaque photographique ?….
Mais le vulgaire est ainsi fait qu’il se laisse prendre facilement à ces boniments, et les photographies d’esprits, affirmées avec audace par des charlatans patentés, ont eu leur heure de vogue. M. le Docteur Baraduc s’est distingué dans cette brillante campagne : il a dit et répété qu’il obtenait à volonté des photographies d’esprits (d’effluves psychiques, ou de fluide vital, ou de corps fluidique, etc.), et il leur a donné le nom superbe de psychicônes. Hélas ! la photographie spirite n’a pas eu une longue fortune. Dès que la science indépendante a voulu s’en rendre compte, les psychicônes se sont évanouis comme de vains fantômes. C’est M. le Dr Guebhard qui a eu l’honneur d’en faire justice, et sa démonstration mérite d’être enregistrée et largement propagée.
Notre savant co,frère n’a pas eu de eine à établir que les fameux psychicônes tiennent à un simple procédé opératoire ou, comme on l’a dit, à un vulgaire coup de pouce. « Nos praticiens, déclare-t-il, omettent uniquement d’agiter leur révélateur. Tout révélateur ou à peu près, abandonné sur une plaque capable de noircir, donne, sans la moindre impression « odique », et si seulement le bain ne dépasse pas quelques millimètres de hauteur, un tachelage, non pas lumineux, malgré les apparences, mais, en réalité, tout chimique, orienté suivant des lignes, non pas d’effluves éthérés, mais de flux liquide, et simulant, par son action sur la [p. 56] gélatine, au cours de ses phases successives, tous les aspects divers que nous avons vus mirifiquement décorés de si beaux noms.
« Rien de plus facile que de suivre tout le processus à l’œil, sans plaque et même sans révélateur, avec un liquide trouble quelconque, pourvu que les particules en suspension ne présentent pas, avec le liquide, une différence de densité telle que l’action de la pesanteur paralyse le libre jeu des actions moléculaires. »
Le Dr Guebhard ne se contente pas d’éventer le truc, il fournit toutes les indications nécessaires pour produire l’image des effluves… du liquide et conclut en ces termes : « Sauf réserve pour le phénomène des auréoles et pour le truc de la plaque mouillée, sur lesquels nous aurons à revenir, je défie le plus énergique des extériorisateurs d’âme et des secréteurs d’effluves de faire résister une aura à la petite balançoire photographique. Agitez donc, messieurs, agitez vos cuvettes, avant de nous servir de pareilles découvertes, et qu’on n’agite plus l’opinion de ce nouvel avatar qui risquerait de compromettre à toujours la cause, après tout défendable, de la recherche, en l’être vivant, d’une modalité particulière de l’énergie échappant à la gamme trop restreinte de nos sens, mais destinée à n’échapper peut-être pas toujours aux instruments des physiciens (1). »
Ln photographie des esprits se trouve ainsi condamnée sans appel. Les effluves psychiques n’existent pas ailleurs que dans l’imagination des spirites. L’âme ne s’extériorise pas parce qu’elle est invisible, indépendante de la matière et de toute localisation, en un mot parce qu’elle est spirituelle. Voilà le dernier mot de la science.
Dr Georges DE LA MORINAIS.
NOTE
(l) La Vie scientifique, 9 octobre 1891. Cf. Revue scientifique, 14 nov. 1897.
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