Joseph Bidez. La métaphysique dans l’Antiquité. Extrait de la revue « L’Antiquité classique », (Paris), tome 10, fascicule 1, 1941, pp. 89-90.

Joseph Bidez. La métaphysique dans l’Antiquité. Extrait de la revue « L’Antiquité classique », (Paris), tome 10, fascicule 1, 1941, pp. 89-90.

 

Joseph Marie Auguste Bidez (1867-1945). Philologue classique et un historien, professeur à l’Université de Gand, il a été l’un des chercheurs les plus éminents de l’hellénisme et de l’histoire de l’Antiquité tardive, en particulier des IIIᵉ et IVᵉ siècles de notre ère. Quelques publications :
— « Les premiers philosophes grecs : Techniciens et expérimentateurs », Le Flambeau : revue belge des questions politiques et littéraires, Bruxelles, Lamertin, vol. 3, no 3,‎ , p. 3-26.
— Catalogue des manuscrits alchimiques grecs, t. VI :Michel Psellus : épître sur la Chrysopée, opuscules et extraits sur l’alchimie et la démonologie, Bruxelles, Lamertin, , XIV-246 p.
Le traité d’astrologie cité par saint Basile  dans son Hexaeméron », L’Antiquité classique, Bruxelles, vol. 7, no 1,‎ , p. 19-21.
— (avec Franz Cumont). Les Mages hellénisés. Zoroastre, Ostanès et Hystape, d’après la tradition grecque, Paris, Les Belles Lettres,   (1re éd. 1938), 412 p.

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Les  images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

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LA MÉTAPSYCHIQUE DANS L’ANTIQUITÉ

par J. BIDEZ.

L’étude des phénomènes psychiques (télépathie, cryptesthésie, etc.) à laquelle, en France, le traité de Richet a donné le nom de « métapsychique » (la « Parapsychologie » des Allemands) compte parmi ses représentants en Angleterre maints savants qui s’appliquent, eux aussi, à faire entrer cette étude dans le domaine de la recherche scientifique et de l’observation expérimentale. Voir ce qu’en dit A. Carrel, dans son livre célèbre, L’homme cet inconnu. p. 144, n.1. Sur les précurseurs de la métapsychique dans l’Antiquité, les recherches les plus pénétrantes et les plus circonspectes sont celles que, sous le titre de Telepathy and Clairvoyance in classical Antiquity, M. H. E. Dodds a publiées dans un recueil d’articles (Greek poetry and life) offert au président de la « Society for psychical Researchs », le professeur Gilbert Murray. On voudrait pouvoir résumer ici ce substantiel et captivant essai. Nous signalerons seulement qu’au nombre des précurseurs anciens de la métapsychique, M. Dodds range à bon droit non seulement Démocrite, ainsi que Chrysippe el Posidonius, mais Aristote lui-même. à qui il aurait pu joindre son maît.rc Platon. Par contre, la part qu’il fait aux néoplatoniciens aurait pu être élargie sans aucune exagération.

Ce n’est pas que M. Dodds se trouve là devant un terrain trop peu familier pour lui. Bien au contraire. Nous lui devons une édition de Proclus (The Elements of theology ou Στοίϰείωσις θεολογιϰή, Oxford, Clarendon Press, 1933), dont un juge particulièrement compétent, M. Theiler (Gnomon, juillet 1936, p. 337) a pu dire que c’est dans son genre une des œuvres les plus marquantes que la philologie grecque ait produites depuis le début du siècle. Pour ce qui concerne la métapsychique, il s’y trouve çà et là (par ex., p. 273, n. 1 sur έπιτηδειότης, c’est-à-dire ce que nous appellerions l’aptitude d’un médium), de précieuses suggestions. De plus, sur [p. 90] le corps astral de la théosophie, M. Dodds a rédigé un chapitre (Appendice II, pp. :H3-321) qui est, à ma connaissance, le meilleur commentaire historique des textes anciens où il pourrait en être question. Tout au plus, à propos d’Aristote, regrettera-t-on que l’auteur n’y ait pas tenu assez de compte des premières publications du philosophe — en d’autres termes, de ce qu’un ouvrage récent de M. E. Bignone permet aujourd’hui d’appeler l’Aristote perdu. M. Jäger déjà, dans son Aristoteles (p. 165), a montré com­bien, avec toute l’Académie dont il faisait partie, dès les débuts de ses recherches scientifiques, Aristote se passionna pour l’observation de la partie « irrationnelle et obscure » de la vie de l’âme. Mais notre chronique risquerait de tromper le lecteur, en se terminant à cet égard par une sorte de réserve. Le travail de M. Dodds est digne de tous les éloges. A elles seules, les XXXIII premières pages de son introduction renferment, sur la vie, l’œuvre et l’influence de Proclus à travers les âges, des précisions toutes nouvelles que l’histoire du néoplatonisme aura à enregistrer.

Notons enfin que le très remarquable essai de notre collègue de l’université de Liège, M. A. Delatte, sur Les conceptions de l’enthousiasme chez les philosophes présocratiques (Paris, Les Belles Lettres, 1934), mérite, pour sa lucidité pénétrante et ses analyses approfondies, d’être mis sur le même rang éminent que les publications du savant anglais dont nous venons de parler. Le travail de M. Delatte nous découvre des vues dont M. Dodds lui-même a fait valoir à juste titre la nouveauté. Il y renvoie ses lecteurs à propos des textes anciens relatifs à la télépathie et à l’action à distance, de même que, pour « l’hallucination visuelle », il met à profit La catoptromancie grecque qui, à elle seule, aurait suffi à assurer à notre compatriote une universelle réputation. Voir DODDS, Telepathy and Clairvoyance, 1.1., p. 364 et suiv., ainsi que notre Revue, t. VII (1938), pp. 463-465.

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