Joanny Roux. Contribution à l’étude du délire des affections fébriles. Extrait de « La Province médicale », (Lyon), 22 mai 1897, pp. 246-249.
Cité par Freud dans son ouvrage : La Science des rêves.
Joanny Roux (1866-19??). Docteur en médecine (Lyon, 1895). Neuro-psychiatre. Médecin des hôpitaux de Saint-Etienne. Quelques publication :
— Les Névroses post-traumatiques. Hystérie. – Neurasthénie.- Sinistrose. Préface du professeur J. Teissier. Paris, J.-B. Baillière et Fils, 1913. 1 vol. in-8).
— L’Instinct d’amour. Paris, J.-B. Baillière et fils, 1904. 1 vol. in-8°.
— Diagnostic et traitement des maladies nerveuses. Préface par J. Teissier. Avec 66 figures intercalées dans le texte. Paris, J.-B. Baillière et fils, 1901. 1 vol.Diagnostic et traitement des maladies nerveuses. Préface par J. Teissier. Avec 66 figures intercalées dans le texte. Paris, J.-B. Baillière et fils, 1901. 1 vol.
— Psychologie de l’instinct sexuel. Avec figures dans le texte. Paris, J.-B. Baillière et Fils, 1899. 1 vol. in-8°.
[p. 246, colonne 1]
Contribution à l’étude du délire des
affections fébriles
par le Dr Joanny Roux, ex-interne des hôpitaux de Lyon.
« Le délire est le songe de ceux qui veillent. »
Pitcairn
Il est curieux de remarquer que le plus fréquent des délires, celui des affections fébriles, a très peu bénéficié des récents progrès de la psychologie et de la psychiatrie ; les aliénistes, mal placés pour l’observer, semblent s’en désintéresser ; les médecins le notent sans essayer de pénétrer son mécanisme ; ceux qui l’ont éprouvé n’ont, le plus souvent, ni les connaissances nécessaires à une étude basée sur leurs souvenirs, ‘ni le désir d’entreprendre ce travail.
On a noté, dans le cours des affections fébriles, des formes de délire très variées délire tranquille sans caractères bien tranchés, véritables accès de manie aiguë, stupeur, idées délirantes systématisées de persécution ou de grandeur, hydrophobie, catatonie, etc. etc.
Depuis que Chaslin (1) sous le nom de confusion mentale, a ressuscité l’ancienne démence aiguë de Pinel et Esquirol, lastupiditéde Georget, Etoc-Demazy, Ferrus, beaucoup d’auteurs rattachent aux états secondaires(2) de confusion mentalele délire des [p. 246, colonne 2] affections fébriles, aussi bien d’ailleurs que la majorité des délires toxiques. Ce rapprochement du délire fébrile avec la confusion mentale est justifié jusqu’à un certain point par le nombre et l’intensité des illusions et hallucinations, l’incohérence apparente des idées, la lenteur et la difficulté des opérations intellectuelles, l’apparence automatique de tous les actes exécutés par le malade, la stupeur qui termine souvent la scène. Mais, dans beaucoup de cas, cette assimilation est fausse les idées paraissent incohérentes parce que le lien qui les réunit nous échappe il suffit souvent, pour le retrouver, d’interroger les souvenirs du malade au début de la convalescence le malade répond mal aux questions qu’on lui pose, les opérations intellectuelles paraissent lentes et difficiles parce que, comme je le montrerai dans un instant, le malade est comme dans un rêve, et cette torpeur apparente cache une cérébration très active les actes nous apparaissent comme automatiques parce que leurs mobiles nous échappent ; on s’en rend compte également encore par l’interrogatoire du malade après sa guérison.
En réalité dans le délire fébrile, comme dans les délires toxiques, les troubles intellectuels sont multiformes. Il existe une de ces formes qui a été peu étudiée et qui doit être rapprochée du délire semblable si bien étudié par Moreau de Tours dans l’intoxication par le haschich, par Lasègue dans l’intoxication alcoolique. Le délire fébrile peut, dans tous ces cas, être assimilé à un rêve se produisant à l’état de veille et se mélangeant à des doses diverses à la réalité extérieure.
A l’état normal, toutes nos opérations cérébrales (sensations, phénomènes intellectuels, émotions, actes dits volontaires) ont une origine extra-cérébrale. La force nerveuse qui, en cheminant à travers les neurones cérébraux, donne naissance à tous ces phénomènes, ne naît pas dans le cerveau elle prend naissance à la périphérie, dans toutes les cellules de notre organisme. Drainée, pour ainsi dire, par les innombrables canalisations du système nerveux centripète, elle est conduite jusqu’à la corticalité et devient l’origine des réflexes cérébraux, ceux-ci comprenant les spéculations les plus hautes d’une intelligence cultivée, comme les opérations intellectuelles les plus simples. Nous sentons, nous pensons nous voulons, non pas seulement avec notre cerveau, mais avec tout notre corps.
Dans le sommeil, l’apport de la périphérie aux centres par le système nerveux centripète, devient minime les opérations cérébrales se ralentissent, les neurones cérébraux ne sont plus traversés que par des courants insignifiants, la conscience disparait. Cependant cette anihilation des opérations cérébrales n’est jamais complète, quelques impressions [p. 247, colonne 1] périphériques parviennent encore à la corticalité ; trop faibles pour éveiller une conscience parfaite, elles restent sub-conscientes et sont l’origine des rêves.
Le rêve a-t-il pour origine exclusiveces impressions périphériques extrêmement faibles et sub-conscientes continuant à être apportées au cerveau pendant le sommeil? On pourrait le soutenir, et le rêve reconnaîtrait alors le même mécanisme que la cérébration normale, avec une seule différence d’intensité. Cela est déjà rendu peu probable par la seule constatation de l’absurdité habituelle des conceptions du rêve. En second lieu, une impression périphérique, très faible, devrait toujours n’éveiller que des souvenirs, des images très faibles, or il est loin d’en être toujours ainsi. Tout le monde connaît, beaucoup pour l’avoir éprouvé, ce que Maury (3) a décrit sous le nom d’hallucinations hypnagogiques. On s’endort tranquillement la conscience à peine disparue le rêve commence ; celui-ci nous présente, par exemple, l’image d’une personne connue, cette image peut être assez vive pour provoquer le réveil, et si, alors, on ouvre brusquement les yeux, l’image est quelquefois assez vive pour se projeter au dehors, constituer une courte mais véritable hallucination. Pendant quelques instants, on croit voir auprès de son lit la personne en question. Il ne s’agit pas là d’un phénomène pathologique beaucoup de personnes le présentent, qui sont absolument normales, et en pleine santé (4). Admettre que cette image intensea eu pour seuleorigine, une impression périphérique faible et inconsciente semble peu logique.
Si, pendant le sommeil, la cellule cérébrale est presque anihilée fonctionnellement, il n’en est pas de même an point de vus nutritif.
Les centres nerveux continuent à être le siège d’échanges nutritifs ils récupèrent parla nutrition ce que la fonction leur a fait perdre. Ces échanges sont même très actifs. Mosso (5) a noté, pendant le sommeil une élévation de la T. cérébrale qu’il attribue aux rêves et à la cérébration inconsciente. Il serait plus juste de dire que les mutations nutritives sont à la fois l’origine de la cérébration inconsciente et de l’élévation de température. Il est, en effet, rationnel de penser que des échanges très actifs puissent agir comme excitants de la cellule [p. 247, colonne 2] nerveuse : le fonctionnement de celle-ci aura pour conséquence l’éveil des souvenirs correspondants. Ceux-ci, à leur tour, pourront devenir le point de départ de réflexes cérébraux plus compliqués se produisant d’après les mêmes lois que la cérébration normale.
En résumé, dans le rêve la cellule nerveuse fonctionne sous deux influences : les impressions périphériques, comme à l’état normal d’une part, le mouvement nutritif d’autre part. Mais le cerveau est organisé pour coordonner (jugement) seulement les actions cérébrales dont l’origine est à la périphérie (état normal). Dans le rêve aux réflexes cérébraux, dont l’origine est à la périphérie viennent, se joindre les actions cérébrales prenant naissance sous l’influence nutritive : les idées sont d’autant moins coordonnées, le rêve est d’autant plus absurde que l’apport de la périphérie est moindre, que le sommeil est plus profond. Remarquons, cependant, qu’un souvenir, une image, une idée nés sous l’influence exclusive du mouvement nutritif peut être le point de départ d’une cérébration coordonnée. Ce qui fait l’incoordination, c’est-à-dire, en somme, l’absence de jugement, c’est la pluralité, la multitude quelquefois des images éveillées en même temps dans la subconscience du rêve, par les mutations nutritives (6).
Ces notions sont applicables de point en point aux hallucinations et au délire des intoxications, surtout de celles produites par le haschich, l’opium, l’alcool. A l’influence du simple mouvement nutritif, il suffit de substituer l’action du toxique. Cette action toxique étant plus intense, il n’est plus nécessaire, comme dans le rêve, que la conscience ait disparu. Les images du rêve sont absolument analogues, dans leur mécanisme aux hallucinations du haschich. Le délire de ces intoxications n’est autre chose qu’un rêve se produisant dans l’état de veille. [p. 248, colonne 1] Comme lui, il se compose de deux éléments d’une part cérébration sous l’influence des impressions périphériques persistantes d’autre part, fonctionnement spontané des centres sous l’influence de la toxine.
Le délire, dit Moreau de Tours, est « un état mixte résultant de la fusion de l’état de sommeil avec l’état de veille, de l’immixtion de phénomènes ou de faits psychiques appartenant au sommeil dans l’état de veille. »
Remplaçons l’action des échanges nutritifs, du haschich, de l’opium, ou de l’alcool par l’action des toxines microbiennes, et nous aurons l’explication de certains délires fébriles.
Il me faut maintenant justifier par des exemples l’assimilation que j’établis entre ces délires fébriles d’une part, le rêve, le délire des intoxications (opium, haschich, alcool) d’autre part (7). Un malade, atteint d’un érysipèle grave, ayant une température de 41°3, commence par avoir un sommeil pénible, entrecoupé de réveils fréquente il rêve continuellement, marmotte des paroles incompréhensibles, semble hagard pendant ses réveils, d’ailleurs très courts. Bientôt il s’agite, se dresse sur son lit, semble regarder au loin des choses invisibles à d’autres moments, il parait prêter l’oreille, parle de tableaux, de musique, de chemins de fer, de tramways se plaint d’abord de voir autour de lui « plus de cinquante personnes ». Un moment après, il demande avec insistance qu’on le ramène chez lui, veut envoyer l’infirmier chercher une voiture, essaye de se lever et veut fuir trois personnes robustes ont grand peine à le maintenir, il crache à la figure d’un de ses bons amis, gifle un infirmier ; on est obligé de l’attacher. A partir de ce moment son délire semble se systématiser il se plaint qu’on fait séquestré, demande instamment à être ramené chez lui ; parle d’action judiciaire, de dommages-intérêts, de duel, trouve le moyen de délier ses liens avec une grande adresse et se précipite sur la porte d’un placard qu’il essaie d’ouvrir comme pour fuir, refuse de boire parce que, dit-il, il ne veut rien recevoir de ses persécuteurs.
Telle est la description objective d’une nuit de délire. Qu’y trouve-t-on ? Au début des rêvasseries, ce que beaucoup d’auteurs se contentent de qualifier délire tranquille. Un peu plus tard, des hallucinations manifestes de la vue, de l’ouïe, des illusions de lieu. Puis l’explosion d’un délire paraissant composé d’idées incohérentes et sans suite. A ce moment, il y a une ressemblance très [p. 248, colonne 2] grande avec un malade atteint de confusion mentale. Un instant après, l’agitation est devenue extrême, le malade ressemble à un maniaque. Enfin le délire se systématise, nous assistons à l’éclosion d’idées de séquestration, de persécution. Dans les menaces d’action judiciaire, de dommages-intérêts, de duel, nous voyons même pointer l’analogie avec le persécuté-persécuteur. En résumé, presque toutes les variétés de délire signalées par les différents auteurs dans la fièvre.
Que va, maintenant, nous révéler l’observation interne, d’après les souvenirs du malade interrogé dès le début de sa convalescence ? Le délire multiforme, signalé plus haut, était, malgré les apparences, parfaitement coordonné il n’y existe pas de lacunes.
Le thème initial du délire a été fourni par les hallucinations de la vue et de l’ouïe : le malade se figurait assister aux expériences réalisées par deux de ses amis. Ceux-ci avaient trouvé un métal doué de propriétés bizarres il se volatilisait sans fondre en produisant un brouillard blanchâtre dans lequel apparaissaient de magnifiques tableaux aux couleurs brillantes, aux scènes séduisantes et changeantes.
En même temps notre malade entendait une musique délicieuse aux sons très élevés, mais très doux. Il n’était nullement étonné de ces effets merveilleux et y voyait une application toute naturelle de la loi de conservation de l’énergie, de la transformation des forces, pour le cas particulier, en sons et eu couleurs !!. Un grand nombre de personnes étaient venues assister à ces expériences et notre malade s’en plaignait. Pour faciliter le départ de tout ce monde, un chemin de ferpartait de la chambre du malade et, invariablement, malgré toutes ses recommandations, à chaque départ son lit se trouvait sur l’un des wagons et on l’emmenait malgré lui. Il demandait en vain à être ramené chez lui. on prenait plaisir à le promener dans les rues en tramway, malgré la pluie dont il sentait très nettement les gouttes. (On peut voir ici, ainsi que dans la sensation de mouvement, de transport, une hallucination de la sensibilité cutanée). Enfin au lieu de le ramener chez lui on l’avait déposé dans une sorte de sous-sol ses deux amis et l’infirmier, se transforment dès lors en persécuteurs et il se souvient très bien d’avoir combiné des projets de vengeance contre eux, cherchant à ce rappeler les articles du code sur la séquestration des malades, projetant une provocation en duel, etc.
Ce récit long et fastidieux était nécessaire pour montrer qu’à aucun moment il n’y eut incohérence dans les idées. Nous y voyons des hallucinations (c’est-à-dire le fonctionnement spontané des centres sensitifs sous l’influence des toxines microbiennes), devenir le point de départ d’une [p. 249, colonne 1]cérébration très active. Dans cette cérébration, comme dans un rêve, nous trouvons deux éléments des réflexes cérébraux dont le point de départ est donné par les hallucinations ; d’autres réflexes dont l’origine doit être recherchée dans les impressions périphériques (par exemple la part occupée dans ce délire par les deux amis que le malade reconnaissait d’ailleurs parfaitement). Ainsi se trouve justifiée l’assimilation, faite au début de ce travail, de certains délires fébriles « à un rêve se produisant à l’état de veille et se mélangeant à des doses diverses à la réalité extérieure ».
Suivant la part prise, dans cette forme de cérébration, par le fonctionnement spontané (sous l’influence des toxines) des centres, ou par leur sollicitation, par des impressions extérieures, la forme du délire est très différente. Ainsi, à la fin de la relation précédente, il n’y a plus qu’une idée délirante, l’illusion de lieu qui fait croire au malade qu’il n’est pas chez lui ; aussi à partir de ce moment le délire s’est-il systématisé avec cette unique idée, fausse comme point de départ toutes les actions du malade en étaient déduites logiquement. Le matin, au moment où la fièvre était moindre, il fut facile de faire disparaître le délire. Il suffit pour cela, qu’un des amis de notre malade, ayant sur lui une certaine influence, lui affirmât qu’il se trouvait bien chez lui, en lui faisant reconnaître les objets familiers qui se trouvaient autour de lui, et en faisant disparaître ainsi l’illusion de lieu, origine des idées délirantes systématisées. L’affirmation de l’ami de notre malade, la reconnaissance des objets environnants, c’est-à-dire, en somme, les impressions nerveuses extérieures, devenant prédominantes, en m3me temps que s’affaiblissait l’action des toxines, telle fut, dans ce cas, la cause de la cessation du délire. Dans la période précédente le délire est beaucoup plus complexe, la part du fonctionnement spontané des centres, des hallucinations est beaucoup plus grande, Un degré de plus et il est probable que les toxines auraient agi simultanément sur un si grand nombre de centres que l’incohérence aurait fait son apparition et que l’assimilation à la confusion mentale (8) serait devenue légitime.
Un degré de plus encore, et les centres sensitifs sont non plus excités, mais paralysés, la stupeur apparaît, pendant que l’excitation des centres moteurs se traduit encore par des mouvements automatiques, de la carphologie. Dans ces deux derniers cas l’interrogatoire du malade, après guérison, ne nous apprend rien il n’existe aucun souvenir. Il est remarquable que, dans le délire fébrile, comme dans le rêve, l’appréciation du temps est complètement faussée. Nous apprécions une durée [p. 249, colonne 2] quelconque d’après le nombre des perceptions qui se succèdent pendant ce temps. A l’état normal le maximum de perceptions, que nous sommes capables d’avoir, atteint à peine dix par seconde. II y a déjà longtemps qu’on a fait remarquer que si, tout d’un coup, nous devenions incapables d’avoir plus d’une seule perception par heure (au lieu de 60 x 60 x 10 = 36,000), un temps donné nous paraîtrait 36,000 fois plus court. La croissance d’une plante nous semblerait durer l’espace d’un instant.
Le phénomène inverse se passe dans le rêve un temps excessivement court nous parait quelquefois d’une durée équivalente à plusieurs jours.
Le malade dont il est question plus haut, après quatre jours de délire, croyait avoir traversé plusieurs semaines. En revenant à l’état normal sa première parole fut pour demander qui est-ce qui avait été nommé à un concours, qui l’intéressait beaucoup, et qu’il croyait terminé depuis longtemps : le concours en question commençait le jour même.
Ce trouble, dans l’appréciation du temps pendant le rêve, le délire fébrile et les-étais analogues, ne peut guère recevoir qu’une explication. Les innombrables perceptions, souvenirs ou images qui remplissent un rêve donné et nous le font paraitre si long ne peuvent pas être successives, ou bien alors il faudrait admettre une augmentation colossale dans la puissance de nos facultés. Ces perceptions sont donc très probablement simultanées une illusion nous les fait paraître successives. Le même phénomène se passe souvent pendant l’agonie, du moins le fait a été noté par plusieurs noyés revenus à la vie.
Remarquons, en terminant, que, même dans le fonctionnement spontané des centres sous l’influence de la toxine microbienne, ce sont les souvenirs qui constituent les éléments de la cérébration. Ces toxines paraissent même pouvoir éveiller des souvenirs depuis longtemps, sinon toujours, relégués dans l’inconscient. J’en possède un exemple typique.
Un malade croit, dans son délire, se trouver dans une chapelle dédiée à une religion nouvelle, bizarre et où viennent beaucoup de curieux. Il engage une conversation intime avec la personne qui se trouve à côté de lui. Cette personne lui révèle bientôt qu’elle est comtesse polonaise. se donne un nom polonais, et se dit la maîtresse d’un des amis de notre malade. Quelque temps après celui-ci, se trouvant avec cet ami en question, lui raconte son délire, et apprend avec stupéfaction que cette comtesse polonaise avait réellement existé, et avait réellement été sa maîtresse.
Il s’agissait évidemment d’un souvenir inconscient rappelé par l’action de la toxine (9). De nombreux faits semblables ont été étudiés dans le rêve.
Notes
(1) Confusion mentale primitive. Congrès, de Blois. 1892.
(2) Par opposition à la confusion mentale dite primitive.
(3) MAURY. – Le sommeil et les rêves, Paris 1861.
(4) Remarquons en passant que c’est dans cet ordre de phénomènes qu’il faut rechercher l’explication des hallucinations télépathiques, ou du moins d’un certain nombre d’entre elles. Celles-ci sont, en effet, à peu près sûrement le produit d’une cérébration inconsciente dont le résultat final, la conclusion, apparaît seule dans la conscience. Elles se produisent presque toujours, comme les hallucinations hypnagogiques, au début du sommeil. Maintenant, y-a-t-il entre cette cérébration inconsciente et son objet un rapport do causalité ? C’est ce qu’il est prématuré d’affirmer ou de nier.
(5) Mosso – La température du cerveau. Analysé in Année psychol., 1894.
(6) J’ai rendu volontairement un peu schématique cette comparaison entre le fonctionnement du cerveau pendant la veille et pendant le sommeil.
Il est bien certain que, pondant la veille aussi, il s’opère des mutations nutritives. Mais le mouvement fonctionnel que celles-ci seraient capables de susciter est masqué par le fonctionnement beaucoup plus énergique qui résulte des impressions venues de la périphérie.
J’ai supposé aussi que les échanges nutritifs étaient à eux seulscapables de faire fonctionner les centres. Peut-être ne font-ils qu’amplifier démesurément les mouvements fonctionnels naissant tous l’influence des incitations très faibles encore apportées par le système nerveux centripète.
Il n’est pas impossible non plus (cela est même probable) que, dans la veille aussi, le mouvement né à la périphérie soit amplifié, dans d’autres cas diminué, par les échanges nutritifs. Mais alors ces modifications se font suivant des lois fixes qui rendent toujours proportionnel l’effet (la célébration) à la cause (impressions périphériques).
Dans le rêve, au contraire, il y a disproportion manifeste entre la cause (impressions périphériques faibles) et reflet (cérébration souvent très active.)
On peut donc admettre comme suffisamment exacte la conception schématique donnée plus haut.
(7) Les exemples suivants me sont personnels et résultent de souvenirs très précis que m’a laissés un délire de quatre jours, durant un érysipèle grave. Je les ai comparés avec les observations objectives faites par les médecins qui m’entouraient, amis dévoues, qui m’ont entouré de soins admirables, auxquels je dois la vie et que je tiens à remercier de nouveau ici.
(8) Dans les cas où la confusion mentale a une autre origine, lorsqu’elle est secondaire à une intoxication, lorsqu’elle est primitive même, nous croyons qu’une observation minutieuse pourrait déceler un but semblable à celui que nous décrivons plus haut et que nous assimilons au rêve.
(9) Certains auteurs signalent, après des maladies graves, l’éveil de facultés nouvelles que ne possédait pas le malade avant sa maladie. Il n’y a probablement là qu’une apparence due à l’éveil du quelques souvenirs inconscients.
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