De la nature du sommeil et des rêves. Par Helgi Pjeturss. 1938.

Helgi Pjeturss. De la nature du sommeil et des rêves. Article parut dans « La Revue Spirite », (Paris), 81^e année, janvier 1938, pp. 21-23.

Helgi Pjeturss (1872–1949). Géologue et philosophe islandais. Il s’intéressa en particulier à l’astrobiologie ; mais aussi au spiritisme aux les phénomènes psychiques de tous ordres, mis aussi à la théosophie et à la littérature islandaise médiévale.

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original. 
– Les images ont été rajoutées par nos soins. . – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection privée sous © histoiredelafolie.fr

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De la nature du sommeil et des rêves

Nous sommes heureux de présenter, pour la première fois, au public français un article d’un savant islandais : le Professeur Helgi Pjeturss, collaborateur à The Occult Review, Light, et à de nombreux organes scandinaves. On peut ne pas se rallier aux vues et conceptions de ce savant de Reykjavick, mais toujours on devra s’incliner devant son originalité et le considérer — ce qui n’est pas un mince éloge à notre époque de plat et universel conformisme — comme un extraordinaire « remueur d’idées ».

N. D. L. R.

Après m’être efforcé pendant plusieurs années de comprendre la nature du sommeil, je décidai en 1902 d’entreprendre des recherches spéciales sur la nature du rêve. Voici pourquoi :

Les psychologues parlent de « visualiser » des idées, c’est-à-dire de rendre les idées visibles, absolument comme si cette faculté de « visualisation » était aussi normale chez l’homme que celle de la vue. Je constatai cependant que j’étais incapable de « visualiser ». Les idées étaient pour moi quelque chose de tout à fait différent des images concrètes. Je ne réussis jamais à voir un visage devant moi, à moins que ce visage ne se trouvât effectivement devant moi. Mes souvenirs ne furent jamais faits d’images mentales. Il me fallut un long temps pour arriver à cette conclusion que je ne possédais pas la moindre capacité de « visualiser » des idées.

Mais ensuite, en comparant mes états de conscience au moment du réveil et durant le sommeil (c’est-à-dire pendant mes rêves), je trouvai une différence énorme. Penser une chose ou un état quand on est éveillé et voir la chose ou expérimenter [p. 21 – colonne 2] l’état, c’est tout à fait différent. Par contre, il n’y a pas de différence entre rêver d’une chose ou d’un état et la voir ou l’expérimenter. Plus j’y pense et plus il me semble remarquable que l’activité des sens soit pratiquement suspendue pendant le sommeil et que pourtant les rêves soient aussi vivants que si les sens étaient actifs. En résumé, les rêves ne sont pas — ou seulement jusqu’à un certain point — des pensées et des réminiscences, mais de la vie sensible et active. Tel était pour moi le problème qui se posait alors, et il m’apparut qu’il était forcément d’une grande importance psychologique. Le temps a prouvé que le problème est encore plus important que je ne l’avais supposé. Il est, effectivement, un problème fondamental.

Patrick Hourihan, Objects of sleep.

Je commençai alors à chercher les causes de cette différence entre les états de conscience de la veille et du sommeil et pendant des années je m’appliquai à découvrir la solution. Mais mes efforts furent vains. Les hypothèses que je formulai, je dus les abandonner, A la fin, je fus frappé en réfléchissant à la transmission de pensée, par le fait que si les [p. 22 – colonne 1] mots peuvent être transmis d’un cerveau à un autre, la même chose peut se produire pour les images (les perceptions cérébrales accompagnant le processus de la vue). Au cours de nombreuses années de travail continu, je vis clairement pour finir que je tenais le fil de la vérité : La connaissance de la nature des rêves constituait le moyen de comprendre la nature du sommeil et de la vie elle-même. Car la vie est entretenue par une sorte d’accumulateur psychique qui est rechargé pendant le sommeil. Nous pouvons arriver à observer nettement l’influx du courant vital quand le sommeil commence et comment avec lui apparaissent les images claires obscures d’un rêve naissant. Pendant le sommeil, nous établissons le contact avec un « émetteur de rêves » —une personne dont le cerveau et les nerfs entrent en communication avec le dormeur. Ce que cette personne vit, le dormeur le rêve, croyant qu’il vit lui-même les événements du « dream-giver » (émetteur de rêves). Ce que le dormeur emprunte ainsi à cette personne est plus ou moins mutilé, altéré, interprété, adapté pour ainsi dire aux dispositions et à l’expérience du dormeur.

Les rêves peuvent être divisés en plusieurs groupes selon le caractère d’intimité du « dream-giver » et du dormeur. Il s’ensuit donc que les différentes phases d’un rêve peuvent se rapporter à différents groupes. Quand les relations sont superficielles et que la transmission est imparfaite, les images émises par le cerveau du « dream-giver » sont transférées au cerveau du dormeur beaucoup plus facilement que le courant de pensées qui accompagnent les images. Alors dans le cerveau du rêveur, ces images, d’après certaines lois d’association, sont interprétées d’une façon erronée, et le rêve n’est tissu que d’illusions, le dormeur croyant [p. 22 – colonne 2] qu’il voit dans son rêve des choses connues. Ce sont là les rêves illusoires correspondant aux enypnia des antiques interprètes de songes, par exemple Artemidore, dont l’Oneirokritikon est le plus intéressant essai sur les rêves que j’aie lu. Quand la transmission du « dream-giver » au dormeur est plus parfaite, nous avons le rêve-vision, l’oneiros d’Artemidore, et en règle générale, ce que le dormeur voit en un tel rêve, lui est étranger et inconnu.

Paul-Delvaux (1897-1994). – Le-Rêve-(1935).

J’arrivai ici à une conception qui me fit d’abord hésiter : Une analyse des rêves-visions conduit à l’inéluctable conclusion que le « dream-giver » peut être un habitant de quelque autre planète. Les êtres humains, les animaux, les plantes, les maisons, les paysages, les constellations, etc., clairement vus dans les rêves-visions, sont parfois tels qu’il n’en existe pas sur notre planète ou dans son ciel.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, il n’y a pas de conviction qui soit enracinée en moi avec une plus grande certitude que celle-ci : Le contact psychique avec les habitants des autres planètes est un phénomène normal de la conscience humaine.

C’est cette communication certaine avec les habitants des autres planètes — je ne parle pas seulement des planètes de notre système solaire — qui a donné naissance à la croyance occultiste en d’autres plans d’existence. La stagnation qui pendant des siècles a pesé sur l’occultisme et ses théories est une preuve suffisante que la connaissance intime de la vérité n’a pas été atteinte. Il n’y aura plus de stagnation dès que le phénomène que j’indique aura été soumis à l’épreuve.

Un autre résultat déconcertant que j’obtins, ce fut la découverte de ce que rappelle la Loi des Déterminants. Pendant plusieurs années, je me suis efforcé [p. 23 – colonne 1] de savoir comment les rêves pouvaient être influencés par les événements qui s’accomplissent à l’état de veille. A mon grand étonnement, je découvris que mes songes étaient beaucoup moins influencés par mes propres sentiments et pensées que par ceux des personnes que j’avais rencontrés dans le courant de la journée. Ces personnes exercent une influence si marquée sur le courant énergétique [p. 23 – colonne 2] qui crée les rêves qu’on peut les qualifier réellement de « déterminants ». Pendant plus de onze ans, j’ai expérimenté cette loi et je suis arrivé à cette conclusion qu’on se trouve là en présence d’une loi fondamentale, d’ordre cosmique et de la plus grande importance.

Dr Helgi PJETURSS,
Ph. D. Geologist à Reykjavik (Islande).
(Version française de Gabriel Gobron).