Charles Richet. Occultisme dans l’Antiquité. Extrait de la revue « Annales des sciences psychiques », (Paris), 12e année, 1902, pp. 310-312.

Charles Richet. Occultisme dans l’Antiquité. Extrait de la revue « Annales des sciences psychiques », (Paris), 12e année, 1902, pp. 310-312.

 

Charles Richet (1850-1935), physiologiste lauréat du prix Nobel de médecine en 1913 pour sa description de l’anaphylaxie. Membre de l’Académie de Médecine, de l’Académie des Sciences, il dirigea le Revue scientifique et nous laissa un grand nombre de travaux, en particulier de nombreux articles dans les revues et l’époque et plusieurs ouvrages. Esprit curieux et ouvert il se révéla tour à tour philosophe, psychologue et excellent littérateur. Il fut l’un des cofondateur de l’Institut Métapsychique International (1919) et consacrera une grande parie de sa vie à l’étude des phénomènes paranormaux ou considérés comme tels, qui le poussèrent quelquefois à des excès de crédulité naïves. Nous retiendrons de ses publications :
— Du somnambulisme provoqué. Extrait du « Journal de l’anatomie et de la physiologie normales et pathologiques de l’homme et des animaux publié par M. Charles Robin », (Paris), onzième année, 1875, pp. 348-377. [en ligne sur notre site]
— Recherches expérimentales et cliniques sur la sensibilité. Paris, Georges Masson, 1877. 1 vol. in-8°.
— Du somnambulisme provoqué. Extrait du « Journal de l’anatomie et de la physiologie normales et pathologiques de l’homme et des animaux publié par M. Charles Robin », (Paris), onzième année, 1875, pp. 348-377. [en ligne sur notre site]
— Recherches expérimentales et cliniques sur la sensibilité. Paris, Georges Masson, 1877. 1 vol. in-8°.
— Un cas de suggestion dans le rêve. Extrait de la « Revue philosophique de la France et de l’étranger », (Paris), XVII, neuvième année, janvier à juin 1884, p. 471.  [en ligne sur notre site]
— Des rapports de l’hallucination avec l’état mental. Article paru dans la « Revue philosophique de la France et de l’Etranger », (Paris), dixième année, tome XX, juillet à décembre 1885, pp. 333-335. [en ligne sur notre site]
— La Métapsychique, d’après un nouveau livre de M. Th. Flournoy. Extrait du journal hebdomadaire « La Semaine littéraire » (Genève), dix-neuvième année, n°889, samedi 14 janvier 1911, pp. 13-15. [en ligne sur notre site]
— Les démoniaques d’autrefois. Partie I. Les sorcières et les possédées. Article parut dans la « Revue des Deux Mondes », (Paris), Le année, troisième période, tome trente-septième, 1880, pp. 550-583. [en ligne sur notre site]
— A propos de Thérèse Neumann. Les jeûnes prolongés. Article parut dans la « Revue Métapsychiques », (Paris), n°5, Septembre-Octobre 1930, pp. 385-395. [en ligne sur notre site]
— L’homme et l’intelligence. Fragments de physiologie et de psychologie. Paris, Félix Alcan, 1884. 1 vol. in-8°.
— Xénoglossie. L’écriture automatique en langues étrangères. Annales des Sciences Psychiques, Paris, 1905. [à paraître sur notre site]
— Traité de Métapsychique. Deuxième édition refondue. Paris, Félix Alcan, 1922. 1 vol. in-8°. [Très nombreuses réimpressions]

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Les  images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

[p. 310]

OCCULTISME DANS L’ANTIQUITÉ.

Il est assez intéressant de comparer aux récits el opinions des spirites d’aujourd’hui les récits et les opinions que les anciens avaient sur la survivance. Sans remonter aux descriptions qu’Homère, puis Virgile, ont données des Enfer ou Champs élyséens, nous nous contenterons de citer un curieux morceau de Plutarque, qui ne semble pas être bien éloigné de l’opinion actuelle des spiritualistes.

C’est donc à eux que nous recommandons le passage suivant ; ils y trouveront peut-être quelque lointaine confirmation de leurs plus chères doctrines. Sur ce point nous n ‘avons pas d’avis à émettre : il nous suffira de reproduire ici le récit du grand moraliste grec, d’après la charmante traduction d’Amyot. Ils y trouveront le périsprit, le corps astral, et autres conceptions qui paraissent modernes, presque contemporaines, tant il est vrai que le nouveau n’est jamais complètement nouveau.

II s’agit d’un certain Thespesius, qui « estant tombé d’un certain lieu hault la teste devant, sans qu’il y eust rien d’entamé, du coup de la chutte seulement il s’évanouit, ne plus ne moins que s’il eust été mort, et, trois jours après, comme l’on estait à préparer ses funérailles, il se revint »… et il raconta ceci :

« Quand l’esprit fut hors de son corps, il se trouva du commencement, ne plus ne moins que ferait un pilote qui serait jecté hors de son navire au fond de la mer, tant il se trouva estonné de ce changement ; mais, puis après, s’estant releivé petit à petit, il luy fut advis qu’il commencea à respirer entièrement et à reguarder tout à l’entour de luy, l’âme [p. 311] s’estant ouverte comme un œil, et ne voyait rien de ce qu’il voulait veoir auparavant, sinon des astres et estoilles de magnitude très grande, distantes l’une de l’austre infiniment, jectant une lueur de couleur admirable et de force et roideur grande, tellement que I’^me, estant portée sur ceste lueur comme sur un chariot, doulcement et uniement, ainsi que sur une mer calme, allait soubdainement partout où elle voulait… il disait qu’il avail veu que les âmes de ceulx qui mouroyent devenaient en petites bouteilles de feu, qui montoyent de bas en hault à travers l’air, lequel s’ouvrait devant elles, et que petit à petit les dictes bouteilles venant à se rompre, et les âmes en sortoyent ayants forme et figure humaine, au demeurant fort agiles et légères, et se mouvoyent…. Or n ‘en connaissait-il point la plus part, mais en ayant apperceu deux ou trois de sa cognaissance, il s’efforcea de s’en approcher et parler a elles ; mais elles ne I’entendoyent point, et si n’estoyent point en leur bon sens, ains, comme estourdies et transportées, refuyoyent toute veue et tout attouchement, errantes ça et là à par elles, du commenment… les austres parvenues en la plus haulte extrémité de l’air estoyent plaisantes et guayes à veoir, et tant gracieuses et courtoises que souvent elles s’approchoyent les unes des austres et se destournoyent au contraire de ces austres tumultuanles… Entre lesquelles il dict qu’il en veil une d’un sien parent, combien qu’il ne la cognoissait pas bien certainement, d’autant qu’il estoit mort, luy estant encores en son enfance ; mais elle, s’approchant, lui dict… Tu n’es pas encore mort ; mais par cette permission de la destinée, tu es venu ici avecque la partie intelligente de ton âme, et, quant au reste de ton âme, tu l’as laissé attaché comme une anchre à ton corps ; et, affin que tu le seache dès maintenant pour cy après, prends guarde à ce que le âmes des trespassez ne font point d’umbre, et ne cloënt n’ouvrent point les yeulx. »

PLUTARQUE. Sur Les délais de la justice divine dans la punition des coupables (Ed. J. de Maistre), trad. d’Amyot, in-8°, Paris, Delagaud, 1862, p. 182-186).

Nous ferons grâce au lecteur des autres observations que [p. 320] Thespesius eut l’occasion de recueillir dans le cours de son curieux voyage parmi les ombres. Tout ce que nous ajouterons à son récit, c’est qu’il paraît avoir été pleinement sincère, et que Plutarque semble ajouter foi sans réserve a tout ce que l’heureux Thespesius a vu.

Charles RICHET.

 

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