Bourru et Burot. Hémorrhagie de la peau provoquée par la suggestion en somnambulisme. Extrait des « Comptes rendus des séances de la Société de biologie », (Paris), 8éme série, tomeII, 1885, pp. 461-462.
Henri Bourru (1840-1914). Médecin, professeur à l’Ecole de médecine de Rochefort.
Prosper Ferdinand Burot (1849-1921). Médecin, professeur à l’Ecole de médecine de Rochefort.
— Multiplicité des états de conscience chez un hystéro-épileptique. Article paru dans la « Revue philosophique de la France et de l’Etranger », (Paris), dixième année, tome XX, juillet à décembre 1885, pp. 411-416. [en ligne sur notre site]
— La Suggestion Mentale et l’action à distance des substances toxiques et médicamenteuses. Avec figures intercalées dans le texte. Paris, J.-B. Baillière et Fils, 1887. 1 vol. 12/19 [in-16], 311 p., 1 fnch. Dans la « Bibliothèque scientifique contemporaine ». – Autre édition : … Avec 15 photogravures intercalées dans le texte. Paris, J.-B. Baillière et Fils, 1895. 1 vol. in-12, XXXIV p., 314 p., 1 fnch., Dans la « Bibliothèque scientifique contemporaine ».
— Variations de la Personnalité. Avec 15 photogravures. Paris, J.-B. Baillière et Fils, 1888. 1 vol. in-12, 314 p., 2 ffnch., Dans la « Bibliothèque scientifique contemporaine ».
Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Les images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr
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HÉMORRHAGIE DE LA PEAU PROVOQUÉE PAR LA SUGGESTION EN SOMNAMBULISME, par MM. BOURRU, professeur de clinique médicale à l’École de médecine navale de Rochefort, et par M. BUROT, agrégé à la même École.
Un jeune homme de vingt-deux ans, atteint d’hystéro-épilepsie des mieux confirmées, fut observé ces temps derniers à la clinique médicale de l’École de Rochefort : au moment de l’observation, il se trouvait hémiplégique et hémianesthésique à droite.
Nous savions, par de nombreuses expériences que, dans l’état de somnambulisme, la suggestion de toute sorte d’actes volontaires réussissait sans hésitation.
Le 6 avril dernier, l’ayant mis en somnambulisme, l’un de nous lui fit la suggestion suivante : « Ce soir, à quatre heures, après t’être endormi, tu te rendras dans mon cabinet, tu t’assoieras dans le fauteuil, tu te croiseras les bras sur la poitrine et tu saigneras du nez. »
Le programme fut fidèlement exécuté et quelques gouttes de sang sortirent de la narine gauche, devant plusieurs personnes venues pour être témoins du résultat.
Un autre jour, l’ayant mis encore en somnambulisme, condition nécessaire chez lui, le même expérimentateur traça son nom sur ses deux avant-bras avec l’extrémité mousse d’un stylet de trousse ; puis lui fit le commandement suivant : « Ce soir, à quatre heures, tu t’endormiras et tu saigneras aux bras, sur les lignes que je viens de tracer. »
A l’heure dite, il s’endort. Au bras gauche, les caractères se dessinent en relief et en rouge vif sur le fond pâle de la peau, et des gouttelettes de sang perlent en plusieurs points. Après trois mois, les caractères sont encore visibles, bien qu’ils aient pâli peu à peu. A droite, côté paralysé, il ne paraît absolument rien.
Depuis cette époque, le malade a été transféré à l’asile de Lafond (La Rochelle). M. le docteur Mabille, le distingué directeur de cet asile, a renouvelé l’expérience. Le 2 juillet, il trace une lettre sur chaque avant-bras ; et prenant la main gauche : « A quatre heures, tu saigneras de ce bras ; prenant alors la main droite : « Et de celui-ci. — Je ne peux pas saigner du côté droit, répond le malade, c’est le côté paralysé. » Avec une ponctualité sans réplique, à l’heure dite, le sang coule à l’endroit marqué à gauche; rien à droite.
Enfin, notre confrère, ayant convié une quarantaine de personnes, dont vingt-cinq médecins environ, a répété devant eux cette expérience, au milieu d’un grand nombre d’autres, qu’il désirait soumettre à leur contrôle.
C’était le 4 juillet, à l’heure même de la séance de la Société de [p. 462] Biologie ; le sujet étant en somnambulisme, avec l’extrémité d’un crayon, il traça une lettre sur le poignet gauche. « Tu vas saigner de suite du bras gauche, commande-t-il. — Cela me fait grand mal. — Il faut saigner quand même. » Les muscles de l’avant-bras se contractent, le membre devient turgescent, la lettre se dessine rouge et saillante, enfin, des gouttes de sang apparaissent et sont constatées par tous les spectateurs. Toutefois, il faut signaler que dans cette dernière expérience, il y eut une erreur de lieu. Ce fut la lettre tracée au voisinage, l’avant-veille, qui laissa suinter du sang. Peut-être la suggestion n’avait-elle pas été assez précise ; peut-être l’exécution était-elle trop rapprochée du commandement, car c’était la première fois que la suggestion n’était pas faite pour un temps éloigné de quelques heures.
L’un de nous était au nombre des témoins de cette expérience.
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