Paul Meunier. Valeur séméiologique du rêve. Extrait du « Journal de psychologie normale et pathologique », (Paris), septième année, 1910, pp. 41-49.
Paul Meunier (1873-1957). Docteur en médecine (Paris, 1900). – Psychiatre, l’un des premiers découvreurs de l’art brut. — Auteur dramatique, poète et romancier sous le pseudonyme de Marcel Réja.
Quelques publications :
— Les rêves et leur interprétation.
— Des rêves stéréotypés. Extrait du « Journal de Psychologie normale et pathologique », (Paris), Deuxième année, 1905, pp. 428-438.
— (Avec Vaschide Nicolas). Des Caractères essentiels de l’image onirique. Extrait de la revue « Annales des sciences psychiques », (Paris), 15e année, n° 10, 1905, pp. 618-627. [en ligne sur notre site]
— (Avec Vaschide Nicolas). Projection du rêve dans l’état de veille. Article parut dans la « Revue de Psychiatrie (médecine mentale, neurologie, psychologie », (Paris), nouvelle série, 4e année, tome IV, n°1, janvier 1901, pp. 38-49. [en ligne sur notre site]
— (Avec Vaschide Nicolas). Le sentiment Poétique et la Poésie des Aliénés poètes. Extrait de la revue « La Plume », (Paris), n° 367-368, 1905, p. 194-200 ; n° 375, 1905, p. 679-686 ; n° 376, 1er août 1905, p. 740-744. [en ligne sur notre site]
— Marcel Réja, L’Art chez les fous : le dessin, la prose, la poésie, Paris, Mercure de France, 1907.
Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’ouvrage. – Par commodité nous avons renvoyé les notes originales de bas de page en fin d’article. – Les images ont été rajoutées par nos soins. Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection privée sous © histoiredelafolie.fr
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VALEUR SÉMÉIOLOGIQUE DU RÊVE (1)
L’étude clinique des rêves nous a conduits loin de Descartes pour qui le rêve, manifestation de l’âme était une fonction aussi constante que la respiration ou la circulation l’est pour nous. Le démenti de l’observation ne l’embarrassait guère. Il lui était toujours possible d’objecter que si de nombreuses personnes croient ne pas rêver pendant la nuit, c’est tout bonnement parce qu’elles ont perdu au réveil le souvenir de leurs rêves. D’ailleurs, à qui n’est-il pas arrivé, sous l’influence d’une sensation fortuite, de se remémorer tout à coup par association d’idées des fragments plus ou moins considérables de rêves faits pendant la nuit, et qui, sans cette sensation fortuite, fussent demeurés à tout jamais inconnus de nous-mêmes ? Partant de là, Descartes croyait pouvoir affirmer que les gens qui croient ne pas rêver sont seulement des gens qui ne rencontrent pas la sensation révélatrice et par conséquent que leur attestation ne saurait avoir aucune valeur pour infirmer une nécessité d’ordre métaphysique.
Cette opinion est évidemment de celles qu’on ne peut réfuter, de même qu’on ne peut pas prouver que Dieu ne soit pas un seul être en trois personnes. Mais l’observation pure et simple nous apprend que le rêve n’est pas un phénomène aussi fugace. Elle nous apprend qu’il n’est pas de forme vésanique qui ne soit précédée sinon accompagnée de rêves, que les troubles mentaux symptomatiques des intoxications, des pyrexies, des déséquilibres divers sont toujours précédés, accompagnés et suivis de rêves, cauchemars, perturbations du sommeil, et que dans ces divers cas pathologiques, le rêve peut [p. 42] représenter l’accident initial d’où semblent découler tous les troubles ou au contraire n’être d’une façon toute évidente qu’un symptôme avant-coureur, qu’un prodrome par où se manifeste en premier lieu la perturbation mentale. L’observation nous apprend en outre que les divers troubles de l’organisme trouvent dans le rêve une répercussion suffisamment définie pour qu’on puisse préciser quel ordre d’images correspond à la perturbation d’un organe donné. Mais d’autre part, de tels rêves ne se rencontrent pas d’une façon constante chez tous les individus souffrant de ces perturbations organiques : Les femmes, les enfants, les névropathes, tous ceux dont le système nerveux est plus susceptible, sont les sujets de choix pour de telles manifestations. (2)
D’autre part, à côté des causes purement morbides capables de susciter les rêves, nous voyons se produire la même élection si nous recherchons le rapport entre les causes uniquement psychiques (préoccupations, émotions) et les rêves : une femme nerveuse, hystérique légère sans accidents, ne manque, pas de traduire dans le monde du rêve une émotion ou une impression qui chez tout autre fussent restées sans répercussion, un enfant frappé dans la journée par le récit d’histoires étranges ou terribles, revoit la nuit suivante en rêves intenses sinon en cauchemars ce même récit, tandis que chez l’adulte sain il ne se passe rien de semblable.
Ces observations, absolument précises, permettent d’affirmer que le rêve dénote en tous cas une susceptibilité mentale particulière. C’est une pierre de touche de l’équilibre psychique.
Pierre de touche, réactif de l’équilibre psychique, le rêve doit-il donc être considéré comme un phénomène morbide réduit à sa plus simple expression, comme un phénomène pathologique très léger mais enfin pathologique ? Malgré l’accumulation des documents, une telle assertion serait sans doute excessive.
Des psychiatres comme Ball, écrivent au cours d’une étude de pathologie mentale des assertions comme celle-ci :
« On voit par là que les hallucinations hypnagogiques donnent la main d’une part au rêve, et d’autre part à la folie : quelle preuve plus manifeste pourrions-nous donner de l’étroite parenté qui relie ces deux états ? »
Il semblerait donc que son opinion fût bien nette. Mais d’autre [p. 43] part, le souci de ne pas heurter de front des croyances banales lui fait émettre plus loin des assertions par trop globales :
« Les rêves sont compatibles avec la santé la plus irréprochable. Les hallucinations au contraire sont toujours l’expression d’un état pathologique, comme nous chercherons à le démontrer plus loin. »
Le rêve atteste que le sommeil n’est pas complet. Un nombre plus ou moins grand de centres secondaires entrent en action, ne participent pas par conséquent au repos général. Aussi les nuits agitées de rêves actifs vous laissent-elles au matin presque aussi fatigué que l’insomnie absolue. Cependant il est deux moments physiologiques où le sommeil est incomplet, où le rêve par conséquent peut être considéré comme un fait normal : ce sont les périodes dites hypnagogiques du commencement et de la fin du sommeil, les deux moments de transition entre l’état de veille et l’état de sommeil, entre l’état de sommeil et l’état de veille.
Tout rêve qui ne correspond pas à ces moments particuliers est un phénomène anormal, je ne dis pas pathologique. Pour juger ce dernier point, il est nécessaire d’y regarder de plus près, il faut remonter à la cause de cette anomalie. Or celle-ci doit être recherchée dans l’une des trois causes qui donnent naissance au rêve :
L’élément psychique pur d’une part ;
La sensation d’origine externe et la sensation d’origine interne d’autre part.
D’origine psychique, le rêve est dû à une préoccupation intellectuelle ou à une émotion impérieuse : il reproduit l’élément causal d’une façon d’autant plus cohérente que celui-ci a été plus fort.
D’origine sensorielle le rêve éveille une image du même ordre que l’impression reçue, mais susceptible des interprétations ,variées et des exagérations qui lui sont habituelles. Le rêve consiste alors en une vision panoramique à laquelle le rêveur assiste en simple spectateur, et où il ne joue qu’un rôle très secondaire.
Toutefois les sensations venues du tact doivent être ici considérées avec celles qui prennent leur origine dans la sensibilité viscérale parce qu’elles aussi déterminent des rêves cénesthésiques. Dans ceux- ci le rêveur n’est plus un spectateur désintéressé, il joue le premier rôle du drame dont il est le centre, et les événements du rêve ont pour but de le léser dans la partie de son organisme qui est précisément [p. 44] la cause du rêve. D’où l’élément de douleur localisée qui caractérise le rêve cénesthésique.
Telles sont les trois grandes catégories de rêves. Mais dans la réalité, il est rare qu’on les rencontre avec cette pureté expérimentale. Selon l’élément qui prédomine, le rêve tend vers l’une ou l’autre et la prédominance d’une des formules est une attestation d’origine.
Même lorsque la cause réside nettement dans la sensibilité, l’élément psychique entre enjeu, car c’est bien entendu lui qui fournit la matière du rêve et nous savons que sa susceptibilité est un facteur considérable de leur apparition. Il n’y a donc pas égalité entre nos trois ordres de causes et le rêve ne porte pas toujours sa marque d’origine d’une façon aussi nette que nous venons de le dire. Il y a un rapport variable selon les individus entre l’intensité de l’excitation et la susceptibilité du système nerveux. Tant que la sensation viscérale n’acquiert pas une certaine gravité, le rêve conserve sa marque d’origine, il reste un rêve cénesthésique traduisant une douleur localisée : l’homme qui souffre d’indigestion sent, et voit un ennemi qui lui enfonce le genou à l’épigastre. Mais, si la sensation cénesthésique irradie et éveille d’autres groupements d’images, qui ne lui sont plus reliés que par l’élément émotif qu’elle contient, le rêve cénesthésique peut faire place à un rêve d’ordre général. Le bambin voit des animaux ou des fantômes qui le terrorisent et dès lors rien dans le caractère même du rêve ne peut en apparence servir à le distinguer d’un rêve dû à une impression psychique. Il est vrai que les anamnestiques permettent presque toujours cette différenciation.
Le rêve anormal, c’est-à-dire celui qui apparaît en dehors des états hypnagogiques du début et de la fin du sommeil peut donc être soit nettement cénesthésique (il signifie alors : traduction d’une sensation tactile ou ligamentaire ou d’un fonctionnement viscéral troublé), soit d’ordre général, il peut alors relever de la sensibilité sensorielle, d’un état d’irritabilité nerveuse ou d’un trouble viscéral sérieux. D’ailleurs l’existence dans la trame du rêve de leit-motifsou répétitions d’une même sensation élémentaire sous des formes imagées multiples, témoigne de la cause persistante, à qui par conséquent revient le rôle prépondérant dans la constitution du rêve, les autres images n’étant que secondaires et groupées autour de celle-ci. Mais dans tous les cas, le rêve signifie susceptibilité nerveuse, pierre de touche [p. 45] de la névropathie, manifestation pathologique légère. De même que l’hallucination, qui est cependant un symptôme plus grave que le rêve puisqu’elle apparaît comme un phénomène primordial de certains délires, peut cependant rester à l’état isolé et ne pas aboutir à ses conséquences vésaniques, de même le rêve même très actif, très tumultueux, peut parfaitement ne pas entraîner des accidents d’aliénation mentale. Assurément, bien des gens rêvent beaucoup, qui ne sont ni fous ni malades et ne le deviennent jamais par la suite. Il y aussi nombre de banquiers d’une honnêteté plus que suspectée qui n’ont jamais été en prison. On ne leur délivrerait pas pour cela un certificat d’honnêteté.
Le gros écueil pour l’interprétation clinique du rêve, celui qui a toujours empêché un symptôme aussi important de prendre place dans la sémiologie générale, c’est précisément qu’il représente un réactif trop sensible. Il crie au meurtre au moindre soupçon d’alerte, et bien que l’on reconnaisse que ses avertissements sont parfois justifiés, on préfère les tenir pour non avenus à cause de leur trop grande multiplicité. Il y a cependant d’une façon générale des caractères de gravité plus ou moins accentués qui permettent d’affirmer l’origine nettement pathologique du rêve.
C’est d’abord la douleur surtout intense et localisée. Elle peut être morale ou physique, se manifester par une sensation désagréable ou par de l’angoisse, des terreurs. Si la douleur est suffisemment caractérisée elle détermine un symptôme dont la signification pathologique ne fait de doute pour personne : Le réveil au milieu de la nuit. Encore faut-il s’assurer que le réveil n’est pas dû à un agent extérieur accidentel.
C’est ensuite l’homogénéité du rêve qui atteste. la persistance du substratum causal. Si le rêve ne fait que des variations autour d’une même idée ou d’une même image, c’est que cette idée ou cette image ont un substratum, et s’imposent à l’esprit par une raison quelconque. Cette homogénéité peut se traduire par la présence du leit-motif dans le rêve :
Un cycle d’idées ou d’images revient avec persistance, séparé par des entr’actes plus ou moins longs d’épisodes variés. Ces entr’actes mêmes peuvent faire défaut. On a alors un rêve clair sinon logique [p. 46] et cohérent. C’est un drame sobre, puissant, qui va droit au but et ne se mélange pas des scories diverses qui encombrent le rêve ordinaire. Cette homogénéité constitue les cycles des rêves analogues et peuvent parfois prendre leur caractère culminant dans la stéréotypie.
Enfin le dernier caractère général que l’on peut attribuer au rêve pathologique n’est qu’une conséquence des deux premiers. C’est la persistance du souvenir. Un rêve quelconque, s’il n’est précieusement noté dans les instants qui suivent le réveil, s’efface bientôt de la conscience et il est impossible de se rappeler ce qu’on a rêvé. Les rêves anormaux au contraire laissent un souvenir persistantsans que le sujet ait besoin de les noter ou de faire un effort de mémoire.
Aucun de ces caractères généraux n’a une valeur intrinsèque permettant d’affirmer un élément pathologique, mais la constatation d’un de ces signes permet d’affirmer l’existence d’une anomalie et invite à étudier de plus près la question. Il faut tenir grand compte aussi de la forme du rêve.
Les faits que nous avons rassemblés nous montrent en effet que par exemple les rêves qui ont leur origine dans un trouble respiratoire se traduisent par des images variées consistant toujours en action d’écrasement, d’étouffement.
Ceux qui ont leur origine dans un trouble circulatoire sont caractérisés par des visions rouges, de sang ou de feu, immobiles ‘et terrifiantes, et ainsi des autres caractéristiques.
Cliniquement les rêves se présentent à nous sous deux aspects :
1° Ils sont cénesthésiques ;
2° Ou d’ordre général.
1. Rêves cénesthésiques. — Le sujet du rêve est une douleur en un point déterminé de l’organisme. Tel organe apparaît au dormeur blessé ou incapable de fonctionner. La signification n’est pas douteuse : Il se passe en ce point de l’organisme quelque chose d’anormal et l’attention devra être portée de ce côté .
Plus rarement il se trouve que le rêveur constate chez autrui, ou chez un animal le désordre en question. Cela ne tient pas à autre chose qu’à la facilité avec laquelle en cas de douleur moins vive, le rêveur traduit toutes sensations en sensations visuelles.
Mais le rêve ne signifie rien de plus. Si le point douloureux est [p. 47] cutané, il faut éliminer d’abord les diverses causes extérieures qui ont pu provoquer une sensation douloureuse. Conrad Jessner rêve qu’il est mordu par un serpent à la jambe et, peu après, voit se développer un anthrax au même endroit. Mais Descartes rêve qu’il est percé d’un coup d’épée et son rêve ne traduit rien autre chose que la morsure d’une puce.
Il ne faut pas faire dire au rêve plus qu’il n’en dit. Il dénonce avec une constante exagération l’existence d’une sensation anormale. A vous de savoir éliminer les causes innocentes qui ont pu provoquer cette sensation.
La présence d’un leit-motif, la répétition du même rêve sous une forme très voisine donnent à croire que l’on se trouve en présence d’un substratum.
La même difficulté d’interprétation se manifeste lorsque la sensation douloureuse concerne un organe profondément situé, un viscère. Il n’y a plus ici à éliminer l’excitant externe fortuit, mais il faut veiller à faire le départ de ce qui est la traduction d’un léger malaise actuel et de ce qui est l’annonce d’un grave trouble prochain. Des cauchemars à localisation stomacale avec sensation de lourdeur, étouffements, bêtes qui vous rongent l’estomac signifient des troubles gastriques, mais est-ce à une actuelle indigestion ou dyspepsie que nous avons affaire, ou bien à l’annonce du néoplasme imminent ? Le cauchemar traduit le trouble fonctionnel. C’est à nous de reconnaître si un léger malaise actuel le justifie. Un homme rêve qu’il ne peut plus expulser ses urines, il sent sa vessie distendue, son scrotum infiltré. En conclurons-nous que la rétention d’urine le menace ? Pas du tout : il se réveille, il a une furieuse envie de pisser. Nous n’irons pas chercher plus loin.
Donc quand le rêve est cénesthésique, s’il s’agit du tégument cutané nous éliminerons d’abord les agents extérieurs, s’il s’agit de sensations viscérales nous chercherons la cause du trouble dans les moindres perturbations fonctionnelles qui peuvent atteindre les organes, et nous éviterons de conclure à l’existence d’une angine si quelques mucosités arrêtées dans le pharynx ont déterminé un trouble respiratoire cause de tout le mal. On se rappellera que la constriction de la gorge chez un hystérique, l’arrachement de la tête chez un épileptique sont liés à une cause générale. [p. 48]
2. Le rêve est d’ordre général. — L’acuité des perturbations viscérales ou la susceptibilité du système nerveux déterminent des rêves d’ordre général dans certains cas qui ne sont pourtant imputables qu’à des troubles cénesthésiques.
Au lieu de localiser l’étouffement à l’épigastre, le rêveur interprète directement l’émotion ressentie, l’angoisse, et il édifie un rêve de visions généralement terrifiantes. L’interprétation de ces rêves de faits est assez délicate. On s’attachera à fixer la couleur émotive ou la sensation cénesthésique liée au récit, soit qu’elle s’en dégage d’une façon évidente, soit qu’elle y soit reliée par une expérience du sujet. Ce point vidé, il faut déterminer si l’origine réside en un trouble cénesthésique actuel, capable de terminer une pareille teinte émotive ou en une préoccupation d’origine exclusivement psychique. Or ces derniers comportent une dramatisation beaucoup plus précise plus sobre, et d’ailleurs la préoccupation psychique et morbide entraînent à l’état de veille une certaine conviction que l’on ne retrouve nullement dans les cauchemars d’origine cénesthésique. Quant aux correspondances somatiques des émotions il semble que le trouble d’un appareil quelconque peut donner naissance à toute la gamme des émotions, le maximum de gêne de la fonction correspondant à l’émotion la plus intense, la plus aiguë. D’une façon générale, on peut dire que les troubles cardiaques aigus entraînent la peur, l’angoisse, les troubles respiratoires de l’angoisse avec sensation d’oppression, d’étouffement, les troubles digestifs de l’angoisse avec sensations gustatives ou olfactives. Mais, comme on le voit, les éléments de différenciation disparaissent avec l’acuité des accidents. Chez l’enfant où le système nerveux très susceptible réagit au maximum à la moindre perturbation, il faudra s’enquérir des troubles somatiques les plus divers susceptibles de donner naissance à des cauchemars d’autant plus difficiles à différencier que l’enfant ne fournit en général que des renseignements extrêmement vagues sur la nature de ses visions. Un certain nombre de caractéristiques peuvent dès maintenant être déduites de l’imagerie du rêve.
La vision du rouge se rencontre dans les phases prémenstruelles, dans les affections mitrales, les phrases préméningitiques, les affections inflammatoires de l’œil, l’aura des attaques épileptiques.
Les hallucinations terrifiantes et la zoopsie ne sont pas spéciales [p. 49] à l’alcoolisme. On reconnaît à ce qu’elles sont multiples, rapides et variées, mobiles dans l’espace, terrifiantes, vespérales et nocturnes de préférence, les hallucinations dites toxiques.
Mais il faut savoir qu’en outre des poisons amenés de l’extérieur, les processus d’auto-intoxication et les infections peuvent leur donner naissance, de même que l’hystérie et la neurasthénie.
Les hallucinations immobiles et mal déterminées sont en rapport avec les lésions cardiaques et vasculaires.
Un rêve stéréotypié poursuit-il le sujet ? Rechercher si l’on y retrouve les phases caractéristiques du rêve épileptique. (Vision rouge, mouvements toniques, mouvements cloniques, mort.) Sinon, les grosses probabilités sont pour l’hystérie (à moins qu’il s’agisse d’un souvenir d’enfance et qu’on puisse reconstituer la cause extérieure identique qui détermine le rêve stéréotypé).
La plupart des rêves que nous avons étudiés apparaissent comme prodromes tant en pathologie générale qu’en pathologie mentale. Les rêves prodromiques sont en effet ceux qui ont le plus frappé les observateurs. Mais il faut savoir que les mêmes cycles de rêves assaillent le sujet pendant l’évolution même de la maladie.
En pathologie mentale, la persistance du rêve est un signe d’activité encore manifeste du processus morbide. Le rêve de convalescence a la plus grande importance pour attester que l’équilibre psychique n’a pas été reconquis d’une façon définitive.
Dr P. MEUNIER.
Note
(1) Cet article doit former un chapitre d’un volume : Les Rêves et leur interprétation, à paraître prochainement sous la signature Dr P. Meunier et R. Masselon.
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