Ernest Langlois. Un évêque de Verdun, prince de Lorraine, ensorcelé, marié et condamné par le tribunal de l’Inquisition. Extrait des « Annales de l’Est », (Nancy), neuvième année, 1895, pp. 277-299.

Ernest Langlois. Un évêque de Verdun, prince de Lorraine, ensorcelé, marié et condamné par le tribunal de l’Inquisition. Extrait des « Annales de l’Est », (Nancy), neuvième année, 1895, pp. 277-299.

Un procès exemplaire de la duplicité de l’Eglise et de ses représentants, mais aussi du bras séculier, pour protéger l’un des leurs.

Ernest Langlois (1857-1924). Historien et médiéviste. Après ses études à L’Ecole nationale des chartes, il obtint le diplôme d’archiviste paléographe (1883) et fut nommé la même année à l’Ecole française de Rome. Il y resta jusqu’à son élection à l’université de Lille où il finit sa carrière comme doyen.
Quelques publications :
— Le Couronnement Looys (1888)
— Origines et sources du Roman de la Rose (1890)
— Le jeu de Robin et Marion (1896)
— Anciens proverbes français (1899)
—  Table des noms propres de toute nature compris dans les chansons de geste imprimées (1904)
— Les manuscrits du Roman de la Rose, description et classement (1910)
— Le Roman de la Rose par Guillaume de Loris et Jean de Meun (1914-1924)
— Adam Le Bossu, Jeu du Pèlerin (1924)

Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Nous avons gardé l’orthographe, la syntaxe et la grammaire de l’original.
 – Par commodité nous avons renvoyé la note originale de bas de page en fin d’article. – Les  images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr

[p. 277]

UN

ÉVÊQUE DE VERDUN, PRINCE DE LORRAINE

ENSORCELÉ, MARIÉ ET CONDAMNÉ

PAR LE TRIBUNAL DE L’INQUISITION

L’histoire qu’on va lire est étrange, et, fait plus étrange encore, aucun historien n’en a fait mention. Il est impossible pourtant qu’une aventure aussi extraordinaire, à laquelle de nombreuses personnes ont été mêlées, arrivée dans la famille alors la plus en vue de France, ne se soit pas ébruitée, malgré les précautions prises pour étouffer l’affaire par les personnes intéressées. Il faut donc attribuer à un parti pris le silence des contemporains qui n’en ont pas parlé en écrivant la biographie du personnage qui en fut le héros.

Ce personnage est un prince de la toute-puissante maison de Lorraine, évêque et comte de Verdun, abbé de nombreux monastères. Erric, ou, comme on l’appelait vulgairement, le duc Erric, est né en 1576, de Nicolas de Lorraine, comte de [p. 278] Vaudemont, marquis de Nomeny, duc de Mercœur, et de Catherine de Lorraine-Aumale. Il était donc frère de la reine Louise, femme de Henri III, frère du duc de Mercœur, le fameux chef de la ligue, frère d’un cardinal de Lorraine, cousin d’un autre cardinal de Lorraine, cousin germain du duc de Lorraine Charles III, etc. Malheureusement pour lui, il n’était que le quinzième enfant de son père, le cinquième d’un troisième lit ; aussi dès son jeune âge, sans consulter ses goûts, uniquement pour lui préparer un avenir, on l’avait destiné à l’état ecclésiastique. Son père avait été élevé dans les mêmes conditions, mais promu aux évêchés de Metz et de Verdun sans avoir reçu les ordres, il avait pu, lorsque l’occasion s’en était présentée, abandonner ses deux sièges épiscopaux pour entrer dans la carrière des armes, épouser successivement trois femmes et en avoir quinze enfants. Le malheur du fils fut d’avoir reçu la prêtrise avec l’épiscopat.

L’instruction d’Erric fut confiée à Christophe de la Vallée, qui était entré, lui aussi, dans les ordres, parce qu’il n’était pas l’aîné de sa famille, avait reçu la cure de Paroi (2) dans le partage des biens paternels et obtenu l’abbaye de la Challade (3) par une faveur du pape. Sans doute comme rétribution des soins donnés à son élève, le précepteur du jeune prince fut nommé maître des requêtes du duc de Lorraine et reçut une pension de 500 livres de la reine Louise.

En 1587, l’évêché de Toul devint vacant par la mort du cardinal Charles de Lorraine ; on ne pouvait songer sérieusement à le donner à Erric, trop jeune, mais on le lui réserva. Sans tenir compte de l’élection de Thierry Thiriot, régulièrement faite par le chapitre, le pape Sixte-Quint, sur les instances du duc de Lorraine, du roi et de la reine de France, plaça sur le siège épiscopal Christophe de la Vallée, à charge pour lui de céder la place à son élève dès que celui-ci serait en âge de [p.  279] l’occuper, et de lui payer, en attendant, une pension annuelle de mille ducats d’or.

En 1593, l’évêque de Verdun étant mort à son tour, le pape Clément VIII, toujours sur les instances de la maison de Lorraine et du roi de France, au mépris de l’élection faite par le chapitre et des réclamations de la cour impériale, donna au duc Erric la juridiction temporelle du diocèse et à l’évêque de Toul, son précepteur, le pouvoir spirituel, avec le titre de suffragant ; puis, dès que le jeune prince eut 21 ans, il obtint une dispense d’âge pour recevoir les ordres sacrés et entra en possession de l’évêché et du comté de Verdun, au mois d’août de la même année (4).

Je n’ai pas l’intention de raconter son épiscopat. Tous ceux qui l’ont fait, les auteurs du Gallia Christiana, Dom Calmert (5), le chanoine Roussel, l’abbé Le Bœuf (6) et d’autres out présenté Erric comme le modèle des évêques, de mœurs absolument irréprochables, partageant ses revenus avec les membres pauvres de son clergé, préoccupé avant tout de réformer les monastères placés sous sa juridiction, cédant en 1610 son siège épiscopal (7) par humilité et parce qu’il n’obtenait pas du roi la restitution de certains droits enlevés à l’église de Verdun, enfin prenant ses dispositions pour être enterré après sa mort (1623) comme un simple moine dans un couvent de capucins. Ces vertus méritent d’autant plus notre admiration que la naissance et l’éducation du prince, les moyens par lesquels il obtint ses bénéfices les faisaient moins prévoir. Mais sont-elles authentiques ?

Dom Calmet a publié (8) un document que les autres historiens ont également connu et qui laisserait supposer que le jeune [p. 280] évêque n’avait guère plus que son père la vocation ecclésiastique. C’est une supplique par laquelle Erric, assurant que sa présence dans son diocèse est non seulement inutile mais plutôt nuisible, demande au pape comme la plus grande des faveurs l’autorisation de prendre les armes contre les infidèles et de verser son sang pour la défense de la papauté, comme l’ont déjà fait ses deux frères, le duc (le Mercœur et le comte de Chaligny ; tout au moins d’être envoyé en ambassade, fût-ce auprès du shah de Perse, afin que sa vie soit digne de sa naissance et de sa famille. Ce que les bénédictins et Dom Calmet ont tiré de ce document ne fait pas honneur à leur sagacité. Les auteurs du Gallia Christiane disent que cette supplique fut écrite en 1596 ; Dom Calmet est du même avis ; il ajoute même que l’évêque se trouvait alors à Rome, où il était venu dans l’intention de se faire jésuite, mais que le pape ne le lui avait pas permis et que les prélats l’en avaient dissuadé, parce qu’il pouvait rendre plus de services dans le monde qu’au couvent.

Comment les historiens ont-ils pu concilier le zèle épiscopal et l’humilité évangélique dont ils font honneur à l’évêque avec les ardeurs belliqueuses et l’orgueil de ce jeune prince qui trouve que le gouvernement du diocèse et du comté de Verdun, pendant la période si difficile des guerres de la ligue, n’est pas digne de lui ? Comment en 1596, alors que son compétiteur, régulièrement élu, que les chanoines, que l’empereur mettaient tout en œuvre pour le déposséder de son évêché, comment Erric osait-il dire au pape que sa présence était inutile à Verdun et même, ce qui peut paraître bizarre, qu’elle y était nuisible ? Il est plus curieux encore que cette supplique soit de l’époque où l’évêque voulait entrer dans l’ordre des jésuites. Enfin il est tout à fait extraordinaire que des historiens sérieux aient pu dater le document de 1596, alors que le suppliant y rappelle la mort de ses deux frères, arrivée en 1601 et en 1602.

Les auteurs du Gallia Christiana savaient par une lettre du cardinal Bellarmin que l’évêque de Verdun avait eu l’idée d’entrer chez les jésuites ; Dom Calmet l’avait appris par des [p. 281] lettres du cardinal d’Ossat. Or Bellarmin ne reçut le chapeau qu’en 1598 et d’Ossat en 1599.

Voici vraisemblablement quelle fut l’origine de ces bruits. Le 19 décembre 1605, le tribunal de l’Inquisition, usant par ordre supérieur d’une excessive indulgence, condamna l’évêque de Verdun à s’exiler de son diocèse et à se retirer chez les jésuites de Pont-à-Mousson, C’est alors qu’Erric dut faire des démarches pour ne pas entrer chez les jésuites ; c’est alors qu’il put dire que sa présence à Verdun était plutôt nuisible qu’utile.

J’ai copié à Rome, il y a quelques années, le dossier très curieux du procès de l’inquisition, non pas, comme on pourrait le croire, dans les archives du Vatican, mais à la bibliothèque du prince Barberini (9). Aux archives du Vatican je n’ai trouvé qu’une seule lettre relative à l’affaire (10). Cette particularité s’explique facilement. En 1605, le nonce à Paris était Maffeo Barberini ; c’est à lui que fut confiée cette affaire ; il put par conséquent garder le double des pièces du procès, soit comme documents historiques, soit plutôt comme « petits papiers » contre la maison de Lorraine. De plus, en 1623, le cardinal Maffeo Barberini devint le pape Urbain VIII et eut toutes facilités pour faire passer, à l’exemple de ses prédécesseurs, des archives pontificales dans celles de sa famille les documents qui lui convenaient.

Je vais mettre sous les yeux du lecteur, soit par extraits ou analyses, soit en les transcrivant ou en les traduisant intégralement les pièces les plus intéressantes du dossier. Je les disposerai dans un ordre qui permettra de suivre facilement la marche des événements.

D’une lettre adressée de Paris par le nonce Maffeo Barberini au cardinal Aldobrandini, en date du 24 janvier 1605, j’extrais les deux passages suivant (11) :

« On dit que l’évêque de Verdun, frère du défunt duc de [p. 282] Mercœur, a épousé une dame appelée Mme de Vatam, qu’il aimait et avec qui il entretenait des relations depuis trois ans ; il est parti avec elle on ne sait pas encore où… »

Et plus loin : « On a appris de meilleure source, au sujet des affaires de l’évêque de Verdun, qu’elles n’ont pas été si loin qu’il ait épousé Mme de Vatam, mais qu’il s’est retiré avec elle dans la province de Berri et que le roi s’entremet pour le tirer de cette grave erreur. »

Comme on le verra plus loin, c’est le premier bruit qui était fondé : le mariage avait bel et bien été célébré, après contrat passé devant notaires, publication du premier ban et dispense des deux autres.

Dans une autre lettre, non datée, mais qui se place chronologiquement ici, on lit : « L’évêque de Verdun, pour les raisons que je vous ai fait connaître précédemment, s’est retiré dans un monastère ; on dit qu’il est disposé à faire intercéder près de Sa Béatitude pour obtenir l’absolution de l’irrégularité qu’il a encourue en célébrant la messe après avoir fait publier des bans pour contracter mariage, ainsi que je vous en ai avisé il y a quelque temps (12). »

Comment l’affaire fut-elle déférée à l’Inquisition ? Est-ce après une enquête qu’auraient provoquée les lettres du nonce ? Est-ce à la suite des démarches de l’évêque pour se faire absoudre ? Je l’ignore. Toujours est-il que dans une assemblée générale tenue le 30 juin 1605 en présence du pape Paul V, le Saint-Office décréta que la cause serait confiée au nonce apostolique près la cour de France, à qui l’on donnerait des instructions précises. Le nonce devait, à Paris ou aux environs, en un lieu qu’il jugerait convenable, examiner l’évêque sur le fait, l’intention et la croyance, et, si l’intention était niée, le faire abjurer en présence d’un notaire et de témoins ; il devait [p. 283] le suspendre de ses fonctions épiscopales et de la célébration de la messe pour un temps à limiter ultérieurement par le souverain pontife, lui imposer des pénitences salutaires, l’absoudre de l’excommunication, lui donner la dispense d’irrégularité dont il aurait besoin, lui assigner pour prison un monastère pour un temps déterminé, le condamner à faire à des jeunes filles pauvres des dots dont le nonce fixerait lui-même le nombre et le montant ; lui dire qu’il n’était pas absous par la bulle Pastoris æterni de Léon X, et enfin procéder contre le prêtre qui avait célébré le mariage (13).

Le cardinal Valenti fut chargé de transmettre au nonce cette décision.

Dans une assemblée nouvelle du Saint-Office, tenue le 18 août, le pape, cédant sans doute aux instances de la maison de Lorraine et de la cour de France, chargea le cardinal Arrigone (14), secrétaire de la congrégation, d’envoyer aux nonces de nouvelles instructions, ayant pour but de modérer la peine à infliger à l’évêque de Verdun. En conséquence le cardinal Arrigone écrivit au nonce la lettre suivante, datée du 22 août :

Très illustre et Révérendissime Seigneur, comme frère. Dans la congrégation du Saint-Office tenue en présence de notre seigneur le 18 du présent mois, on s’est occupé de l’affaire de Monseigneur l’Evêque de Verdun, précédemment commise à V. S., sur l’ordre de Sa Sainteté, par la lettre de l’illustrissime seigneur cardinal Valenti : Après avoir examiné et considéré de nouveau les peines et pénitences que vous devez imposer au-dit Monseigneur suivant les instructions de la susdite lettre, Sa Sainteté, pour de bonnes raisons, a décidé qu’au lieu de prison vous lui imposiez l’exil de la ville et du diocèse de Verdun pour un temps qu’elle limitera elle-même, et que vous ayez soin de ne faire aucune mention dans la sentence d’une assignation quelconque d’un monastère pour prison. En outre il a été convenu que ledit Monseigneur, pour l’excès qu’il a commis, a besoin que la provision de l’église et des titres des autres bénéfices qu’il possède soit revalidée ; c’est pourquoi vous l’avertirez en secret qu’il y pourvoie, et que quand il réclamera cette provision, Sa Sainteté la lui [p. 284] accordera aussitôt avec toute sa bienveillance. Je m’offre et me recommande à vous de bon cœur. De Rome, le 22 août 1605.

Mais le nonce n’avait pas reçu la lettre du cardinal Valenti et n’en apprit l’existence que par celle du cardinal Arrigone. Il en avisa donc celui-ci dans sa réponse datée du 20 septembre. « Il peut se faire, ajoutait-il, que la lettre ait été remise à quelque agent de l’évêque et qu’un accident ait empêché jusqu’ici qu’elle me parvînt. » S’il la reçoit, il procédera conformément à sa teneur, sauf les restrictions contenues dans les nouvelles instructions.

Le 31 octobre le cardinal Arrigonc lui répondit:

Très illustre et Révérendissime Seigneur comme frère. J’ai appris par votre lettre du mois dernier que vous n’aviez pas encore reçu celle du cardinal Valenti relative à l’affaire de Monseigneur l’évêque de Verdun ; j’en ai fait part à Sa Sainteté et à mes illustrissimes et révérendissimes collègues les cardinaux à la congrégation tenue le 20 du présent mois. Bien que Sa Sainteté ait reçu assurance de l’agent du duc de Lorraine accrédité près de sa cour que ledit Monseigneur comparaîtra de lui-même et que la lettre en question vous sera présentée, néanmoins par précaution et pour plus ample information elle m’a ordonné de vous envoyer un double de cette lettre ; mais malgré toutes les recherches, on ne l’a pas trouvée enregistrée ; je vous envoie donc le texte du décret ordonné par notre seigneur en cette affaire dans la congrégation du Saint-Office, tenue le 30 juin (15), et dont copie avait été donnée au cardinal Valenti pour qu’il vous écrivît conformément à sa teneur. Je vous rappelle par ordre de notre seigneur que dans l’instruction et l’expédition de cette affaire vous devez vous conformer à ce décret, sauf les restrictions contenues dans ma lettre du 22 août, et que vous devez, au lieu d’imposer un monastère pour prison, imposer l’exil de la ville et du diocèse de Verdun. Dans la certitude que vous exécuterez ces ordres avec toute votre prudence, je vous souhaite toutes sortes de prospérités. De Rome, le dernier jour d’octobre 1605.

Cependant on ne restait pas inactif à la cour de Lorraine, et l’on n’y reculait devant aucun procédé capable d’entraver [p. 285] l’exercice de la justice. Nous verrons tout à l’heure quelle grotesque comédie on avait jouée en février et mars, dans les appartements du cardinal de Lorraine, à Nancy, pour fournir des circonstances atténuantes au coupable en le faisant passer pour maléficié. D’autre part il n’est pas douteux que la lettre du cardinal Valenti ait été interceptée par l’évêque de Verdun. Le nonce l’insinue dans sa lettre du 20 septembre au cardinal Arrigone, et il était évidemment bien renseigné ; en même temps il signale le fait au duc de Lorraine (16) et s’en plaint à l’évêque de Verdun lui-même par la lettre suivante datée du 28 septembre :

Monseigneur, je ne puis m’empêcher de vous (17) faire savoir mon déplaisir de ce que, je ne sais par quel accident, la lettre qui me confie votre affaire se trouve retardée, ainsi que j’en rends compte à Son Altesse le duc de Lorraine, votre cousin, par une lettre expresse, dont je joins copie à la présente pour vous montrer mon désir de vous satisfaire. Je suis certain que, étant donnée votre sagesse, vous supporterez ce retard en vous conformant à la volonté de Dieu, qui sans doute veut exercer votre patience pour rendre plus méritoire ce que vous ferez. Je vous plains et désire vous offrir le plus tôt possible mes services. Je vous baise la main.

Du reste, et c’est bien là un aveu, l’agent du duc de Lorraine à Rome donne au pape l’assurance que l’évêque de Verdun se présentera de lui-même et qu’en même temps la lettre perdue sera remise au destinataire.

Grâce à cette manœuvre les intéressés connaissaient d’avance la sentence des juges et en retardaient en même temps le prononcé, ce qui leur permettait d’en faire modifier par des démarches nouvelles les dispositions les plus graves. Ils obtinrent ainsi que la prison à laquelle devait être condamné l’évêque fût remplacée par l’exil peu gênant du diocèse de Verdun. [p. 286]

Le nonce ayant reçu toutes les instructions nécessaires assigna l’évêque de Verdun à comparaître devant lui le 14 décembre, à Vincennes, dans le monastère des Minimes, dit monastère des Bonshommes.

 l’heure convenue, Étienne Cordonnier, notaire public à Paris, donna lecture des deux lettres du cardinal Arrigone et du décret du Saint-Office, qui commettaient la cause à Monseigneur Barberini. Après que l’authenticité de ces pièces eut été vérifiée par Pierre Calzarello, docteur in utroque jure, prêtre du diocèse d’Adria, Jérôme Stephanucci de Todi et Jules Roffino de Rome, l’inculpé fut introduit et le nonce lui fit subir l’interrogatoire suivant :

Premièrement de son nom et cognom, qualité et âge. Lequel, sur ce interrogé :

A dict se nommer Henry de Loraine, evesque et comte de Verdun, âgé

de trente ung an ou environ (18).

Enquis combien de temps il y a qu’il est pourveu de l’évesché de Verdun :

A dict qu’il y a douze ou treize ans.

Enquis s’il n’a pas faict sa demeure eu l’abbaye de Jarcy, distant de Paris de six lieues (19) :

A dict y avoir demeuré,

Enquis depuis quel temps il y a demeuré :

A dict qu’il y a ung an qu’il y demeuroit ou environ.

Interrogé si pendant le temps qu’il a demeuré en la dicte abbaye il cougnoissoit l’abbesse (20) :

A dict que ouy.

Interrogé de quoy et comme il cougnoist la dicte abbesse :

A dict qu’il la cougnoist par le moyen de madamoiselle de Vattan sa [p. 287] sœur, qui pour lors demeuroit en la ville de Paris, laquelle luy en a donné la cougnoissance.

Interrogé combien de temps il a demeuré en la dicte abbaye de Jarcy : A. dict y avoir demeuré quinze jours durant,

Enquis ou il faisoit sa demeure en la dicte abbaye :

A dict que c’estoit en une chambre de la maison de l’abbesse.

Interrogé depuis quel temps il a cougneu la dicte damoizelle de Vattan , sœur de la dicte abbesse :

A dict qu’il y a ung an et demi qu’il la cougnoit.

Enquis qui lui a donné la cougnoissance de la dicte damoiselle :

A dict que sç’a esté ung sien serviteur qui se nomme Gouaise, lequel [il] nous a dict s’estre retiré d’avec luy depuis huict mois en ça (21).

Interrogé si pendant le dict temps qu’il a demeuré en la dicte abbaye de Jarcy il a familièrement conversé avec la dicte damoiselle de Vattan :

A dict que huit jours après qu’il fut logé en la dicte abbaye il avoit familièrement conversé avec la dicte damoiselle de Vattan, mesmes avoir eu sa compaignée charnelle.

Enquis s’il cougnoist le pere et la mere de la dicte damoiselle de Vattan :

A dict que non et qu’ils sont morts.

Interrogé si pendent le temps qu’il a esté en la dicte abbaye de Jarcy il a pas voullu faire promesse de mariage a la dicte damoiselle de Vattan, et si de faict il ne luy a pas faict promesses de mariaige :

A dict que a la vérité il luy a faict promesses de mariaige, mais que c’estoit a cause que la dicte damoiselle de Vattan ne luy vouloit permetre l’avoir sa compaignée charnelle sinon a ceste condition.

Si en exécution des dictes promesses il y a eu quelque acte faict et quel :

A dict que ouy, sçavoir qu’il y eust ung ban faict ou proclamation faicte en l’église de Varenne, parroisse de Jarcy (22), mesmes ont esté fiancés en la dicte abbaye de Jarcy par le prestre qui faict l’office en la dicte abbaye pour les religieuses, et ce par la permission du curé de Varennes.

Enquis s’il sçait le nom du prestre qui les a fiansez :

A dict ne sçavoir le nom.

Enquis s’il a mémoire d’avoir cougneu le dict prestre et s’il a bien remarqué a son visaige de quel aage, quelle barbe, quelle stature, et [de] quel paya il estoit :

A dict que lors des dictes fiansailles, le dict prestre estoit blesme, portant barbe noire et de grande stature, et du pays de Normandie, ainsi que le dict prestre luy avoit dict. [p. 288]

Interrogé s’il a mémoire et cougnoissance du curé de Varennes :

A dict que jamais il ne l’a veu.

Interrogé si avant les fiansailles il y a eu proclamations de bans :

A dict n’i avoir en que ung ban proclamé, et que pour les deux aultres le prestre de Jarcy eust dispense et permission du curé de Varennes.

Interrogé si la dicte permission du curé de Varennes a esté donnée par escript et de qui elle estoit signée :

A dict qu’elle estoit par escript, et ne se souvient si estoit signée ni de par qui.

Interrogé s’il a la dicte dispense ou permission :

A dict que non et croit qu’elle soit et est entre les mains du prestre de Jarcy ; toutesfois que depuis la dicte damoiselle de Vattan l’a retirée du dict prestre.

Enquis s’il a veu la dicte dispense :

A dict que non.

Interrogé comme il sçait qu’il y a eu dispense par escript :

A dict que la dicte damoiselle de Vattan lui a dict.

Interrogé si de vray il a pas espousé en face de Saincte Eglise la dicte damoiselle de Vattan, et quel jour et mois :

A dict et recougneu avoir esté mariés ensemblement et sollemuisé le mariaige en la dicte abbaye de Jarcy environ le mois de janvier ou febvrier derniers (23).

Enquis qui estoit présent lors des dictes espousailles :

A dict que l’abbesse du dict lieu, et un certain nommé Herbelain, auquel il avoit promis le prendre à son service, à la prière de la dicte damoiselle, et ung aultre nommé Aubert, et quelques servantes de la dicte damoiselle y estoient présente.

Si despuis les dictes espousailles il a pas eu la compaignée charnelle de la dicte damoiselle de Vattan :

A dict et confessé avoir eu sa compaignée charnelle depuis les dictes espousailles par plusieurs fois pendant ung mois et derny et en divers lieux.

Interrogé si depuis les mois de janvier et febvrier il a veu, hanté, fréquenté et habité avec la dicte damoiselle de Vatta :

A dict que non et qu’il l’a quictée et ne l’a onques veu depuis. [p. 289]

Si depuis le dict temps il n’a poinct faict d’aultres amitiés avec aultres femmes ou filles, et s’il a avec luy serviteurs q ni l’out induit cy devant et encores a présent l’induisent et persuadent a continuer à ses premières voluntés :

A dict que non et que depuis il n’a eu familiarité avec aucunes. Interrogé si depuis les dictes fiansailles il a célébré messe ou faict quelques actes pontificaulx, ou s’estre inmiscé es choses sainctes et sacrées :

A dict que une fois seulle il a célébré la messe, dont il avoit eu absolution de quelque prédicateur Jacobin, lequel disoit avoir ceste puissance à cause de la bulle du pape donnée à ceulx de la confrairie du rousouer (24), de laquelle il estoit, et encores faict son jubilé dernier, et confessé et receu la saincte communion en particullier, sans avoir dict et célébré la messe.

Enquis en quel habit il estoit lors des fiansailles et espousailles faictes en la dicte abbaye de Jarcy :

A dict estre babillé en seculier avec ung habit de satin verd.

Enquis s’il avoit une espée :

A dict que non.

Interrogé si les promesses de mariage ou aultres choses faicte(s] entre luy et ta dicte damoiselle de Vattan ont esté rédigées par escript ou soubz seings privés ou par devant nottaires ou aultres personnes :

A dict que ung nommé Herbellain, recepveur des tailles de Bretaigne, dressa (en la ville de Paris, avant qu’ilz fussent nansez) un contract de mariage entre Iuy respondant et la dicte damoiselle de Vattan, et fut signé tant du dict respondant que de la dicte damoiselle.

Interrogé que portoit le dict contract :

A dict qu’il portoit qu’ilz se prometoient de se prendre l’un l’aultre en mariage, et, entre aultres clauses, que la dicte damoiselle de Vattan lui donnoit en faveur du dict mariage la somme de douze mil escus  contant (25)

Enquis si le dict contract de mariage fut a l’instant signé des nottaires :

A dict que deux nottaires de la ville de Paris furent appellez par le dict Herbellain, qui avoit dressé le dict coutract, et en leurs présences fuct dict ans dictz nottaircs par le dict Herbelluin que c’estoit la damoiselle de Vattan qui prestoit la somme de cinquante mil livres au dict sieur respondant, et ne fuct leu le dict contract, et à l’instant fuct signé le dict contract par le dict respondant, Herbelain , ung de ses serviteurs qui s’appelle Henry Oubert, qui est encores demeurant avec luy, et par les dictz nottaires, combien que lors ny après le dict contract signé aucun argent ne fuct compté ni nombré (26), s’estans contantés les dictz nottaires de la déclaration [p. 290] qu’avait faicte le dict sieur respondant qu’il estoit comptant bien qu’il n’eust rien receu.

Interrogé s’il a levé les actes tant des fiansailles que des espousailles et aultres choses faictes pour raison du dict mariage :

A dict qu’il n’a rien levé des choses ausdictes.

Enquis s’il y a minutte et instrument du dict contract de mariage et entre les mains de qui il est demeuré :

A dict que le dict contract est demeuré entre les mains de la damoiselle de Vattan, et qu’il n’y a minutte aucune demeurée vers les nottaires, a cause que le dict Herbelain faisoit a croire que c’estoit une obligation de prest.

Interrogé si lorsque le contract fut passé devant les nottaires en présence du dict Herbelain quel habit il avait :

A dict qu’il estoit et avoit le mesme habit que lors des fiansailles, qui estoit de sattin verd.

Interrogé si lorsqu’il fut en la dicte abbaye de Jarcy avec la dicte damoiselle de Vattan a quelle intention il y alloit :

A dict que son intention n’estoit que de contenter ses affections et pour avoir cougnoissance charnelle avec la dicte damoiselle de Vattan.

Interrogé s’il avoit intention de contracter mariage avec la dicte damoiselle et la fianser et espouser :

A dict que son intention n’a jamais esté de l’espouser, ains seulement de satisfaire a ses affections et appetitz charnels.

Interrogé entre quelles personnes il estime que l’on puisse contracter mariage :

A dict que cela se fuict entre les laiques seulement.

Interrogé ce qu’il croit du mariage :

A dict qu’Il croit que c’est ung sacrement.

Enquis pourquoi il a contracté mariaige, veu qu’il estoit et est ecclésiasticque :

A dict que par fragilité il a faict cela, et pour satisfaire a ses appetitz et affections, et croit que sç’a esté par une sorcelerie que le dict mariage a esté faict ; a exibé une attestation au susdit monsignor Nunce, (27) par laquelle il prétend qu’il appert avoir esté desensorcelé, dont la teneur cy après sera au bout du présent procès (28). [p. 291]

Le dict monsigneur le Nunce luy a (30) remonstré qu’il avoit faict une grande et lourde faulte de s’estre tant oublié a commectre un tel acte.

Le dict monsigneur de Verdun a supplié le dict monsigneur le nunce (31) d’avoir pitié de luy, se submettaut à la misericorde de nostre sainct pere et à la sienne (32).

Après lesquelles interrogatoires faictes et icelles levés et relevés de mot a aultre, [il] a icelles signées en la presence du susdit monsigneur le nunce (33) et de moy (34) nottaire pour ce appellé , après que le susdict monsigneur le nunce l’a (35) interpellé de lui (36) dire s’il avoit a adjouster ou diminuer quelque chose, lequel a dict qu’il ne veult rien adjouster ou diminuer, et a déclaré ce que dessus estre veritable. Les an et jour que dessus. Signé: Erric de Lorraine.

Voici maintenant la curieuse attestation d’ensorcellement et de désensorcellement présentée au nonce par l’évêque de Verdun :

Depuis plusieurs jours l’illustrissime évêque de Verdun éprouvait un malaise ; contrairement à son habitude, il avait le sommeil agité et troublé par des frayeurs soudaines ; ayant remarqué que sa douleur augmentait lorsqu’il regardait le portrait d’une courtisane (37) qu’il avait près de lui, il commença à se demander s’il n’y avait pas dans cette peinture quelque sortilège ou quelque maléfice. Ayant remis le tableau à l’un de ses domestiques, celui-ci l’apporta secrètement au père Michel Morazano, de l’ordre de Saint-Ambroise, afin que selon son habitude il cherchât par des prières et des exorcismes si l’on n’en avait pas fait un objet de maléfice, Le père Michel l’ayant examiné, à l’insu de l’illustrissime évêque de Verdun , celui-ci ressentit un changement dans son état, une lourdeur de tête et je ne sais quel malaise dans les bras, qu’il attribuait toutefois au jeu de paume, auquel il s’était livré la veille.

Le père, informé de cette particularité, supposa qu’il y avait quelque [p. 292] maléfice caché et voulut s’en rendre compte par des exorcismes faits sur la personne même de l’évêque. C’est pourquoi le 18 février., après la messe, dans la chambre du cardinal, après la récitation des litanies et une confession générale, il ordonna que si quelque démon, auteur ou conservateur de maléfice, se trouvait en l’illustrissime évêque, il se manifestât en provoquant de la chaleur ou du froid ou quelque douleur dans l’estomac ; et monseigneur aussitôt dit qu’il ressentait une chaleur inaccoutumée dans l’estomac ; le père ordonna que cette chaleur montât de l’estomac dans la tête, et immédiatement l’illustrissime évêque éprouva dans la tête une très légère douleur accompagnée de chaleur. Le tout s’évanouit peu après sur l’ordre du père. Celui-ci, non content de ces manifestations bien que nullement équivoques, exigea d’autres preuves et voulut que le démon soulevât tantôt un doigt tantôt un autre suivant qu’il le lui commanderait. Le démon obéit et leva le doigt que le père lui avait ordonné de lever s’il était un démon de terre ; toutefois les jours suivants, par des signes qu’on lui avait demandés, il témoigna qu’il était de feu ; mais les deux témoignages étaient exacts, comme la suite l’a démontré ; en effet plusieurs démons inférieurs présidaient à ce maléfice, les uns de terre, les autres de feu.

Le samedi 19 février, avant midi, le père ayant reconnu, grâce à sa longue expérience, qu’il y avait maléfice, voulut qu’il fût manifeste non seulement à lui-même, mais encore à d’autres témoins ; il ordonna donc au démon, s’il était de terre, de faire un signe que le père avait indiqué secrètement à l’illustrissime cardinal et à Monseigneur de Châtillon. Ce signe consistait à soulever le medius de la main gauche de l’évêque, le reste de la main demeurant immobile ; le démon obéit aussitôt, bien que Monseigneur l’évêque n’ait pu ni savoir ni deviner quel signe le père avait demandé.

Le même jour après midi, après la récitation solennelle des litanies ct une confession générale, comme le démon avait annoncé qu’il détruirait le maléfice et sortirait le lundi de la huitième semaine suivante, le père commença à agir avec vigueur et lui enjoignit de s’en aller plus vite ; l’esprit indiqua qu’il ferait ainsi ; alors le père lui ordonna de lever la main droite s’il était pour sortir la semaine prochaine, et s’il devait sortir seulement la seconde semaine, de lever la main gauche ; l’esprit résista quelque temps, mais enfin leva la main droite.

Le 20 février avant midi, après la messe, en présence de l’évêque de Toul et d’autres ecclésiastiques, le démon, sur l’ordre du père, fit d’abord signe qu’il était prêt à obéir ; le père lui ordonna ensuite, s’il était entré par un aliment comestible ou potable, de lever l’auriculaire de la main gauche, le reste de la main demeurant immobile : il éleva l’auriculaire gauche ; enfin le père voulant être renseigné d’une façon précise lui ordonna de lever le medius, s’il était entré à l’aide d’un aliment comestible, de lever l’auriculaire [p. 293] s’il était entré à l’aide d’un breuvage : immédiatement il souleva l’auriculaire et le père en conclut que le maléfice avait été donné dans un breuvage.

Le lundi 21 février, le démon ayant promis précédemment de sortir ce jour même pendant la messe, le père le pressa de tenir sa promesse et de rompre le maléfice ; l’esprit fit les signes convenus et le père reconnut que quelques démons étaient sortis, mais qu’il en restait encore plusieurs pour présider au maléfice ; il le comprit par des indices que le démon lui donna sur sa demande ; c’est pourquoi il le pressa ce jour même et les jours suivants d’indiquer au nom et par l’intercession de quels saints il sortirait, quel jour et comment il signalerait son départ : le démon fit savoir qu’il sortirait le 8 mars, par l’intercession des saints apôtres Paul et Barthélémi.

Les jours suivants, le père continuant à presser le démon, lui demanda des signes que lui-même indiquait secrètement, comme nous l’avons déjà expliqué précédemment, aux assistants, parmi lesquels se trouvaient, outre le cardinal, Monseigneur l’évêque de Toul et les seigneurs de Châtillon et de Beaupré ; et souvent le démon donna ces signes, fournissant ainsi à tous des preuves irrécusables du maléfice, puisque l’évêque de Verdun ne pouvait par aucun moyen savoir quels signes avaient été convenus.

Ensuite le père voulut connaître quel avait été le but du maléfice, si c’était l’amour, la haine ou quelque antre but pervers, et le démon fit les signes convenus pour indiquer que l’amour avait été le but du maléfice.

En outre, puisqu’il était évident que l’auteur du sortilège avait eu l’amour en vue, le père crut devoir demander si le maléfice devait aussi conduire au mariage, et aussitôt en présence de tous les témoins le démon donna, les signes convenus pour indiquer que le but du sortilège était le mariage.

Les jours suivants le père s’occupa de faire confirmer au démon ce qu’il avait révélé précédemment, en répétant les signes qu’il avait déjà donnés, et ainsi tout le monde fut certain que· les révélations précédentes étaient vraies et avaient été obtenues sans fraude.

Enfin le 8 mars, avant la messe, le prêtre enjoignit au démon de répéter les signes qu’il avait déjà souvent donnés, et le menaçant des peines les plus graves (37) n’obéissait pas ou s’il trichait, et le démon obéit, et en guise de serment, sur l’ordre du père, il manifesta tous les signes convenus.

On commença la messe ; lorsqu’on fut à l’élévation, comme depuis le commencement de l’office le père n’avait cessé de presser énergiquement le démon, Monseigneur commença à chanceler et à baisser la tête, en même temps il ressentit de la chaleur dans l’estomac, un souffle chaud lui sortit [p. 294] par les oreilles qui lui tintaient ; c’était le signe convenu par lequel le démon devait annoncer son départ, signe que l’évêque ignorait. Le père lui avait prescrit ce signe parce qu’il avait reconnu que le chef des démons était de feu.

Auparavant le père avait jeté sur des charbons ardents bénits la peinture dont il a été parlé plus haut, après l’avoir mise en morceaux : d’abord elle faillit éteindre le feu, toutefois elle finit par se consumer, non sans difficulté, en dégageant une forte puanteur.

Les jours suivants, par des prières et des exorcismes nombreux on chercha s’il ne restait rien du maléfice ; à de nombreuses reprises on convint de signes par lesquels, si quelque démon était encore présent, il devait se manifester, mais aucun de ces signes ne fut répété, et le père en conclut que le sortilège était détruit et que les démons étaient bien expulsés. Et tous ceux qui avaient été témoins de ces faits avec le cardinal, c’est-à-dire Monseigneur l’évêque de Toul, les seigneurs de Châtillon et de Bellevaux et l’official de Reims, ont signé.

Signé : Charles, cardinal ; — François Joulet ; — de Chastillon. — Je soussigné affirme que, appelé par mon sérénissime seigneur le duc, par mon illustrissime seigneur le cardinal légat et par monseigneur l’évêque de Verdun, j’ai assisté à tout ce à quoi dans le récit qui précède je suis dit avoir été présent. Signé : Christophe, évêque et comte de Toul ; — Je père Michel Murazano , général de la congrégation des saints Barnabé et Ambroise ; — Je, frère Zacharie, vicomte de l’ordre des saints Barnabé et Ambroise ; — Rousselet, official de Reims.

A cette attestation en est jointe une autre, datée du 26 mars 1605, du père Michel Murazano, recteur général de toute la congrégation des saints Barnabé et Ambroise, envoyé l’année précédente par le duc de Savoie près du cardinal Charles de Lorraine pour le « soigner ». Ce document n’ajoute rien au précédent. Le père Michel ayant soupçonné « qu’une fée ou un démon » résidait dans le corps de l’évêque de Verdun, constata en présence du cardinal et de nombreux ecclésiastiques l’existence d’un maléfice et délivra l’évêque par des exorcismes (38). [p. 295]

L’interrogatoire terminé, le nonce demanda à l’évêque de Verdun s’il était disposé à faire ce qui lui serait ordonné ; sur sa réponse affirmative, il l’assigna de nouveau au même lieu pour le 19 du même mois à fin d’entendre prononcer la sentence.

Le lundi 19 décembre, dans la même salle du couvent des Bonshommes de Vincennes, en présence des témoins sous­signés, spécialement convoqués, « et de quelques autres », lecture ayant été donnée par le notaire à l’évêque de Verdun de l’interrogatoire qu’il avait subi le 14 et de ses réponses, le nonce lui dit : « Frère, d’après ce que tu as fait tu nous es fortement suspect d’être tombé dans l’hérésie qui assure faussement que le mariage n’est pas un sacrement mais un contrat, et qu’il peut être célébré même par ceux qui ont reçu les ordres sacrés, c’est pourquoi il est nécessaire que tu te purifies et que tu abjures l’hérésie susdite. »

Alors l’évêque, à genoux, les deux mains posées sur les évangiles [p. 296] jura qu’il professait la foi telle que l’église catholique l’enseigne ;

Qu’il croyait et professait que le mariage est un des sept sacrements institués par J.-C., qu’il ne pouvait être contracté que par des laïques, et que, par conséquent, il reniait l’hérésie qui prétend faussement que le mariage n’est qu’un contrat et que la vie conjugale est permise à tous ;

Que jamais à l’avenir il ne ferait de promesses semblables à celles qu’il a faites à Mlle de Vattan de la prendre pour femme, ni rien de ce qu’il a reconnu avoir fait ou dit dans cette affaire, et qui tombe sous l’accusation de l’hérésie susdite ;

Qu’il était disposé à faire la pénitence que le nonce lui imposerait.

Après cette abjuration, le nonce prononça la sentence. Je n’en donnerai que le dispositif, laissant de côté les formules et les considérations qui n’apprennent rien de nouveau :

… Nous. te condamnons, ou plutôt nous t’imposons les pénitences suivantes. D’abord nous te suspendons de tes fonctions épiscopales et de la célébration de la messe jusqu’à ce qu’il plaise à notre très saint seigneur le pape Paul V d’en disposer autrement ; nous enjoignons et ordonnons que pendant le même temps tu t’exiles de la ville et du diocèse de Verdun ; nous voulons et commandons que pendant un an commençant aujourd’hui tu récites les sept psaumes de la pénitence une fois par semaine ; que pendant le même temps tu jeûnes tous les samedis, en l’honneur de la très glorieuse vierge Marie ; que pendant un an, chaque dimanche, tu reçoives la sainte Eucharistie après t’être confessé ; que tu maries huit jeunes filles pauvres, vierges et nées de parents honnêtes, en faisant à chacune d’elles une dot de cent écus d’or, en l’espace de deux ans, à savoir quatre d’aujourd’hui en un an et quatre l’année suivante ; que pendant cette première année et jusqu’à ce qu’il ait plu à notre très saint seigneur le pape Paul V d’en disposer autrement, tu fasses ta résidence habituelle chez les pères jésuites, dans leur maison de Pont-à-Mousson ; que tu renvoies Henri Oubert de ton service ; que jamais tu ne reprennes ni lui ni Herbellin, qui est déjà parti ; que toutes les fois que le sérénissime duc de Lorraine ou l’illustrissime cardinal de Lorraine, ensemble ou séparément, te demanderont de renvoyer des serviteurs ou des familiers actuellement à ton service, tu les renvoies sans retard, et que tu ne puisses plus les reprendre. Enfin, par [p. 297] mesure de bienveillance, nous te donnons dispense sur l’irrégularité que tu as contractée.

Les témoins qui ont signé la sentence sont, outre le nonce, Francois de Harlay, abbé commandataire du monastère de Saint-Victor près Paris ; les frères Jean Moulin, correcteur du couvent des Bonshommes, et Joseph Le Tellier, religieux du même couvent ; noble homme maître Antoine Pené, seigneur de la Porte, avocat au Parlement de Paris ; Étienne Cordonnier, notaire public à Paris et notaire de la cour épiscopale de Paris.

Enfin le nonce avertit l’évêque en particulier qu’il n’avait pas été bien absous par la constitution Pastoris œterni, et le prévint que s’il n’observait pas la sentence qui venait d’être prononcée, il pourrait être jugé comme relaps et impénitent.

Deux jours après, le 21 décembre, le nonce écrivait au duc de Lorraine que, conformément au désir exprimé dans sa lettre du 6 courant (39) il avait expédié l’affaire le plus rapidement et de la façon la plus favorable qu’il lui avait été possible. Il insistait sur l’importance qu’il y avait à éloigner de l’évêque plusieurs de ses familiers, afin de lui enlever l’occasion d’une rechute. Il ajoutait que s’il n’avait pas envoyé cette lettre par l’intermédiaire de l’évêque, c’était pour expédier les choses plus rapidement. C’était évidemment là un prétexte ; cette lettre, très courte, pouvait être écrite, sans rien retarder, avant le départ d’Erric et même avant le prononcé de la sentence. En vérité le nonce craignait que l’évêque ne fût pas un messager sûr.

Le nonce envoyait en même temps une lettre analogue au cardinal de Lorraine.

Enfin, le 26 décembre, il écrivait au cardinal Arrigone pour l’informer que le procès était terminé. Voici sa lettre, qui nous apprend pourquoi il attachait tant d’importance au séjour [p. 298] de l’évêque chez les jésuites, et au renvoi de certains de ses familiers qu’il n’a pas cru devoir désigner:

« Monseigneur l’évêque de Verdun est venu dans un monastère des frères de Saint-François de Paule, situé près d’une terre appelée le Bois de Vincennes, à deux lieues de Paris, et là, en exécution des commandements de V. S. illustrissime et conformément au décret de la très illustre congrégation du Saint-Office de l’inquisition, je l’ai examiné sur le fait et sur l’intention. Il a nié l’intention ; je l’ai fait alors abjurer, je l’ai absous de l’excommunication et je lui ai imposé la pénitence que V. S. illustrissime verra par la teneur de la sentence jointe à la présente. Comme pénitence salutaire, entre autres choses, il doit renvoyer de son service un certain Umbert et ne plus le recevoir parmi ses familiers, pas plus qu’un certain Erbellin, déjà parti, lesquels furent l’occasion principale de sa faute. Et parce que j’ai appris par Mme de Mercœur (40), belle-sœur de l’évêque, dame d’une vie exemplaire et très pieuse, et par d’autres personnes graves et dignes de foi, que le dit Monseigneur a d’autres serviteurs d’une conduite peu recommandable et capables de le faire prévariquer, mais qu’il ne serait pas facile de les éloigner de lui sans l’autorité du duc de Lorraine, il m’a paru bon de l’obliger d’une manière générale à renvoyer ceux de ses serviteurs que le dit seigneur duc de Lorraine et l’illustrissime seigneur cardinal de Lorraine jugeront à propos d’éloigner de lui. Je l’ai disposé à prendre pour habitation la maison des jésuites de Pont-à-Mousson , terre voisine de Nancy, hors du diocèse de Verdun. Là, par la fréquentation des pères, il évitera de nombreuses occasions qui pourraient lui être funestes. Mme de Mercœur m’ayant fait avertir que si l’on n’agissait pas ainsi, il resterait par sa faiblesse (facilità) exposé au danger des conversations pernicieuses. J’ai aperçu en lui, autant qu’on peut en juger par l’extérieur, de véritables signes de repentir et de contrition. Si V. S. illustrissime désire que je fasse rédiger le procès et la sentence en forme authentique, qu’elle veuille bien m’en donner avis. En attendant, avec ma plus humble révérence, je lui baise les mains.

Cette lettre est chronologiquement la dernière pièce du dossier. Cependant le rôle du nonce n’était pas terminé avec la condamnation de l’évêque de Verdun ; il devait encore pour suivre le prêtre qui avait célébré le mariage. Mais les documents relatifs à cette affaire conservés à la bibliothèque du [p. 299] prince Barberini ne concernent que la maison de Lorraine. J’ignore donc ce qu’est devenu le prêtre trop complaisant ; s’il est vrai, comme le dit Erric, qu’il a fui, si enfin on put le retrouver. J’ignore également ce qu’est devenue Mlle de Vattan. Sa sœur ne semble pas avoir été inquiétée, puisqu’elle garda son abbaye jusqu’à sa mort.

Je n’ai pas entrepris d’écrire la biographie du duc Erric ; j’ai voulu simplement en faire connaître un épisode omis par les historiens et qui m’a paru digne d’être mis en lumière. Je m’arrêterai donc ici, après avoir fait remarquer toutefois que la supplique de l’évêque de Verdun au pape, dont il a été parlé précédemment, se place naturellement après le procès que je viens de raconter, mais qu’elle ne peut être postérieure à l’année 1608, puisque l’évêque y dit qu’il a confié l’administration de son diocèse à son cousin Charles, duc de Lorraine, et que celui-ci mourut le 14 mai 1608.

Ernest LANGLOIS.

 

Notes

(1) C’est du moins la date donnée par les historiens ; peut-être faut-il la reculer d’un an ou deux. Les auteurs du Gallia Christiane, après avoir dit que le duc Erric est né le 14 mai 1576, ajoutent, quelques lignes plus loin, qu’il entra en possession de l’évêché de Verdun le 24 août 1693, à l’âge de 21 ans. Lui-même, dans l’interrogatoire qu’il subit le 14 décembre 1605, ct qu’on lira plus loin, se dit à âgé de trente ung un ou environ ».

(2) Aujourd’hui dans le département de la Meuse .

(3) Aujourd’hui dans le département do la Meuse.

(4) Conf. ci-dessus page 277, noto 1.

(5).

(6) Histoire ecclésiastique et civile de Verdun, pur l’abbé Roussel, édition revue par l’abbé Le Bœuf. Histoire ecclésiastique et civile de Lorraine

(7) A son neveu Charles, fils du comte de Chaligny. Cette fois le pape exigea que le nouvel évêque attendrait au trentième année pour recevoir les ordres et exercer les fonctions épiscopales.

(8) Ibid., Preuves.

(9) Dans le registre LXII[, 5.

(10) C’est la lettre du 24 janvier 1605, dont on trouvera plus loin deux extraits.

(11) Cette lettre, écrite en italien, est conservée au Vatican dans le registre 50 de la Nonciature de France. La même lettre, mais sans nom da destinataire, et datée du 23 janvier, se trouve dans le dossier de la bibliothèque Barberini (fol. 57 et suiv.), avec quelques variantes. Dans celle-ci l’évêque est dit fils et non frère du défunt duc de Mercœur; les deux qualifications sont également exactes.

(12) Fol. 127 du registre de la bibliothèque Barberini.

(13) Le texte du décret est au dossier.

(14) Telle est l’orthographe constante de ce nom dans toutes les pièces du dossier.

(15) J’ai donné plus haut les dispositions de ce décret.

(16) Dans sa réponse du 28 septembre au duc qui lui avait écrit en faveur de son cousin.

(17) Pour plus de clarté et de brièveté, je remplace constamment l’expression « Votre seigneurie illustrissime » par « vous ».

(18) L’évêque de Verdun avait un frère appelé Henri ; lui-même s’appelait Erric et signait Erric de Lorraine ou Erricus a Lotharingia. Henry est sans doute une traduction fautive du notaire. Dieu que l’interrogatoire, more Francisæ, eût dû se faire en français, le nonce posait ses questions en latin et le notaire tes traduisait aussitôt. Il en était peut-être de même des réponses.

(19) Gerciacum ad fluviolum Ederam, prope villam Cumbas (Gallia Christiana). On verra plus loin que l’abbaye de Jarcy faisait partie de la paroisse de Varennes en Brie. — Varennes, petit village sur l’Yères, dans le département de Saine-et-Oise.

(20) Jeanne du Puy, fille de Vincent du Puy, seigneur de Vatan, et de Louise Robertet, après avoir administré pendant trois ans le monastère de Saint-Antoine à Paris, devint abbesse de Jarcy en 1600 et garda cette fonction jusqu’à sa mort, on 1610.

(21) Ce Gouaise ost évidemment le même qui est appelé plus loin Herbelin.

(22) L’expression signifie, non pas que Varennes est de la paroisse de Jarcy, mais que Varennes est la paroisse de Jarcy.

(23) Le manque de précision dans beaucoup des réponses de l’évêque est extraordinaire et ne peut s’expliquer que par l’imbécillité ou la mauvaise foi. Personne n’admettra qu’un homme sain d’esprit ait oublié si rapidement, non seulement le jour, mais le mois de son mariage. En tout cas, ce mariage eut lieu avant le mois de février. Le nonce en avait déjà entendu parler le 23 janvier. Erric va recounaitre, dans quelques instants, que pendant un mois et demi après son mariage il eut « compaignie charnelle » avec Mlle de Vattan. Or il est certain qu’au milieu de février il l’avait déjà abandonnée, puisque déjà à cette époque il se faisait exorciser pour chasser les maléfices par lesquels cette « courtisane » l’avait séduit.

(24) Rosaire.

(25) En 1602 l’écu d’or avait été mis à 3 livres 5 sous.

(26) Aucun argent ne fut compté en présence des notaires pour simuler un prêt : ce qui ne veut pas dire que le duc Erric n’a pas touché les douze mille écus d’or que lui donnait Mlle da Vattan.

(27) Il y avait d’abord nous a exibé …, on a effacé nous qui a été remplacé par au susdi monsignor nunce. Dans la suite de l’interrogatoire les mots en italiques sont de même des mots substitués à nous ou à ses équivalents. Les mêmes changements ont été introduits dans la rédaction du procès partout où il les comportait.

(28) On trouvera plus loin la traduction de cette attestation, qui est rédigée en latin.

(29) Au lieu de Luy avons.

(30) Au lieu de Nous supplie.

(31) Au lieu de de nous.

(32) Au lieu de notre.

(33) Au lieu de notre.

(34) Au lieu de nous l’avons.

(35) Dans le manuscrit : le substitué à nous.

(36) Je traduis ainsi le mot muliercula. Celle que l’évêque traite ici de courtisane n’est autre que Mademoiselle de Vattan, jeune fille d’excellente famille, qu’en quelques mois il avait débauchée, épousée, puis délaissée.

(37) On ne voit pas bien quelles pouvaient être ces peines.

(38) Quelle est la morale dans cette comédie ? La mauvaise foi du père Michel n’est pas douteuse ; l’évêque de Verdun, qui soulevait le médius ou l’auriculaire, chancelait ou sentait des souffles chauds dans ses oreilles avec tant d’à-propos, était évidemment, lui aussi, un farceur. Mais les témoins étaient-ils dupes ou compères ? A. priori la seconde hypothèse paraitrait la plus vraisemblable ; mais il faut se rappeler qu’à cette époque, en Lorraine et dans toute la région de l’Est, les prisons regorgeaient [p. 295] de prétendus sorciers et sorcières ; que les tribunaux ne cessaient de condamner des malheureux accusés de sortilèges, d’assister aux sabbats, d’entretenir des relations avec les démons ; que des juges de cette région ont écrit de volumineux ouvrages sur· les sorciers et leurs pratiques ; que dom Calmet leur a consacré un chapitre de son histoire de Lorraine, sans élever le moindre doute sur l’origine diabolique de leur puissance. On sait d’ailleurs que cette maladie sévissait, quoique à un degré moindre, dans les autres parties de la France. C’est en 1617 que Léonora Galigaï fut brûlée. Les témoins qui ont signé l’attestation pouvaient donc être de bonne foi. Il est du moins certain que le principal d’entre eux, le cardinal de Lorraine, non seulement croyait à la sorcellerie, mais encore se considérait lui-même comme la victime d’un maléfice, et c’est précisément pour l’exorciser que le père Michel Murazano, un spécialiste, était venu exprès de Milan à Nancy, avec d’autres religieux de sa congrégation, également experts en l’art d’ expulser les démons : « La santé du cardinal Charles de Lorraine, raconte dom Calmet, avoit toujours été fort chancelante. On prétend qu’en 1595 on lui donna un maléfice qui lui causa dans tous les membres de si étranges douleurs que les médecins d’Italie, de France, d’Allemagne, de Lorraine ct de Flandres qu’on employa pour le soulager n’y purent trouver aucun remède ; mais le marquis de Sulin, ambassadeur du duc de Savoye en Angle terre, lui ayant dit que les religieux Ambrosiens de Milan, de l’ordre de saint Jérôme, avaient un grand talent pour exorciser, et qu’ils avaient guéri le cardinal Amédée d’une semblable maladie, il en fit venir quelques-uns en Lorraine en 1604, et par le moyen de leurs prières et de leurs exorcismes il se sentit fort soulagé de ses douleurs ; mais il lui resta toujours une si gronde faiblesse dans les bras, les jambes et le reste du corps qu’il demeura comme perclus pendant toute sa vie, Pour récompenser les Pères Ambrosiens ses bienfaiteurs, il les introduisit dans le Prieuré et dans l’église de Saint-Nicolas­du-Port dont il venait d’unir les biens à la Primattale de Nancy, Ces bons Pères y demeurèrent jusqu’en 1613, que les Benedictins-Réformez de Saint-Vanne y entrèrent en leur place. » (Ibid., III, 76.)

(39) Cette lettre n’est pas la seule que le duc ait envoyée au nonce relativement à cette affaire. Voy. ci-dessus, page 285, note 1.

(40) Marie de Luxembourg, veuve de Philippe Emmanuel, duc de Mercœur et de Penthièvre.

 

 

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