Jean Vinchon. La conception de la folie chez Schopenhauer. Article paru dans le « Journal de psychologie normale et pathologique », (Paris), XXIe année, 1924, pp 488-493.
Jean Vinchon nait à Ennemain près de Péronne en 1884, et meurt à Paris le 15 novembre 1964. Sa thèse de doctorat en médecine, ayant pour thème le délire des enfants, en 1911 devant un jury de la Faculté de médecine de Paris. Il sera un collaborateur de Gilbert Ballet, et Médecin assistant du service de psychiatrie à l’Hôpital de la Pitié de Laignel-Lavastine. Psychiatre et historien de la médecine il s’intéressera beaucoup au paranormal, au diable, à l’hypnose, mais aussi à l’art dans ses rapports avec la folie. Il collaborera avec Maître Maurice Garçon dans un ouvrage qui reste une référence : Le Diable. Il sera membre de l’Institut Métapsychique International (IMI). Quelques titres de travaux parmi les 500 publications connues :
— Délires des enfants. Contribution à l’étude clinique et pronostique. Thèse de la faculté de médecine de Paris n°388. Paris, Jules Rousset, 1911. 1 vol. in-8°, 165 p., 2 ffnch.
— Hystérie. Paris, Stock, 1925. 1 vol. in-16, 122 p.
— L’art et la folie. Paris, Stock, 1924. 1 vol. in-18, 127 p. Illustrations. Dans la collection « La culture moderne ».
— La conception de la folie chez Schopenhauer. Article paru dans le « Journal de psychologie normale et pathologique », (Paris), XXIe année, 1924, pp 488-493. [en ligne sur notre site]
— Le songe de Poliphile ou la tradition dans Freud. Article parut dans la publication « Le Disque vert », (Paris-Bruxelles), deuxième année, troisième série, numéro spécial « Freud », 1924, pp. 62-69. [en ligne sur notre site]
— La part de la maladie chez les mystiques. L’article que nous proposons est extrait d’une revue devenue fort rare : Pro Medico, revue périodique illustrée. Paris, 3e année, n°2, 1926, pp. 36-44. [en ligne sur notre site]
— Essai d’interprétation des phénomènes de l’incubat. Article parut dans le « Journal de Psychologie normale et pathologique », Paris, 1927, 24, pp. 550-556. [en ligne sur notre site]
— Bouffée délirante chez une démoniaque, guérie par suggestion. Article paru dans la revue « L’Encéphale », (Paris), 1928, pp. 944-957, [en ligne sur notre site]
— Les guérisseurs – Du rôle de la suggestion dans les succès obtenus par les guérisseurs (Institut International d’Anthropologie n°13 de 1928).
— Sur quelques modalités de l’Art inconscient. 1928.
— Les faux Dauphins et leurs prophètes. 1929.
— Une extatique stigmatisée : Maria de Mörl. Article paru dans les « Études carmélitaines – Douleur et stigmatisation », (Paris), Desclée de Brouwer et Cie, 20e année, — vol. II, octobre 1936, pp. 79-80. [en ligne sur notre site]
— Le fluide de Mesmer est-il une énergie physique ou une force métapsychique. 1935.
— Le problème des stigmates et son intérêt métapsychique. 1936.
Diagnostic entre la transe médiumnique et les états similaires pathologiques. 1937.
— La psychothérapie dans l’œuvre de Mesmer. 1939.
— La part de la maladie chez les mystiques. Pro Medico, revue périodique illustrée. Paris, 3e année, n°2, 1926, pp. 36-44. [en ligne sur notre site]
Les aspects du diable
à travers les divers états de possession. Article paru dans le numéro spécial des » Études carmélitaines » sur « Satan ». (Paris), Desclée De Brouwer, 1948. 1 vol. in-8°, 666 p. – pp. 464-471. [en ligne sur notre site]
— Les formes et les éléments de la psyché dans la conception de Jung Marcel Martiny, 1964.
— Avec Maxime-Paul-Marie Laignel-Lavastine. Une observation d’incube à la Renaissance.] in « Annales médico-psychologiques », (Paris), douzième série, tome premier, quatre-vingt-unième année, 1923, pp. 203-206. – Et tiré-à-part : Paris, Masson et Cie, 1923. 1 vol. in-8°, pp. 203-206. [en ligne sur notre site]
Les [p.] renvoient aux numéros de la pagination originale de l’article. – Les images ont été rajoutées par nos soins. – Nouvelle transcription de l’article original établie sur un exemplaire de collection personnelle sous © histoiredelafolie.fr
[p. 488]
LA CONCEPTION DE LA FOLIE
DANS L’ŒUVRE DE SCHOPENHAUER
Les philosophes avant le début du XIXe siècle s’étaient peu attardés à l’observation clinique des aliénés : ils ne soupçonnaient pas le précieux appoint que la psychologie morbide pouvait leur offrir et négligeaient le contact immédiat avec la vie, dont le manque a fait la sécheresse et l’artificiel des scolastiques. Schopenhauer comprit, un des premiers, qu’il devait profiter des progrès récents de la médecine mentale, en incorporant à son œuvre les réflexions que lui avaient suggérées ses visites aux malades.
Des chapitres importants sont consacrés à la folie dans Le monde comme volonté et comme représentation et dans L’essai sur les apparitions des Parerga et Paralipomena. De 1819 à 1851, Schopenhauer avait continué ces études, qui aboutirent à une conception générale des maladies mentales. D’abord presque seulement psychologique, cette conception pénétra par la suite de plus en plus dans la biologie, et s’enrichit de notions physiologiques et cliniques, empruntées aux travaux de l’Ecole de Pinel et d’Esquirol ainsi qu’aux premières études sur le sympathique.
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Le paragraphe 36 du livre III du Monde comme volonté traite des rapports du génie et de la folie et limite le terrain commun. L’aliéné, comme l’homme de génie, ne connaissent le monde que par intuition ; ni l’un ni l’autre ne font appel à la faculté discursive ou abstraite et ne vont s’embarrasser dans les détours de la logique. Mais l’intuition géniale peut saisir bien plus intimement l’essence des choses, et les fous ne font paraître une étincelle de génie que par accident, car la folie est maîtresse, une fois installée. [p. 489]
Pour trouver un criterium de la nature de la folie, il faut recourir à la comparaison de cet état avec le simple bon sens. Il est possible de s’arrêter à celui-ci : le fou est capable d’intelligence, il ne se trompe pas dans la connaissance du présent immédiat ; ses divagations se rapportent toujours à l’absent ou au passé, car chez lui les souvenirs des choses éloignées dans l’espace ou le temps sont isolés du présent. La vue d’un objet n’évoque plus que les rapports immédiats et non ces rapports lointains, qui seuls nous renseignent bien sur cet objet. Nous devons nous arrêter au mot rapport et à ces autres mots qui l’expliquent : souvenir régulièrement coordonné, pour bien entendre la pensée de Schopenhauer. La folie est tout autre chose qu’une simple maladie de la mémoire. Elle est aussi une maladie de la mémoire logique et raisonnante et, partant, de tout le psychisme avec les associations d’idées et le jugement, car la simple mémoire persiste chez les aliénés : « beaucoup de fous savent un grand nombre de choses par cœur et ils reconnaissent parfois des personnes qu’ils n’ont pas vues depuis longtemps ».
Les altérations de la mémoire de ces malades comportent, en plus des oublis, des exaltations, comme lorsqu’une scène du passé est reproduite avec les vives couleurs d’une vision qui semble appartenir au présent. Ces visions ou hallucinations ne constituent que des épisodes inconstants de la folie. Des fictions, constructions imaginatives, peuvent enfin combler les lacunes des souvenirs dus à la maladie. Elles se reproduisent sous forme d’idées fixes dans la mélancolie et la monomanie, d’accidents éphémères et mobiles dans la démence ou fatuitas. Un passé chimérique est édifié à l’aide de matériaux réels et d’images morbides, mêlés dans un chaos qui bouleverse le sentiment de la personnalité du sujet comme celui du monde extérieur. Le présent, isolé du passé et du lointain, est privé de ses sources nourricières : peu à peu, il devient un sol aride, qui garde à peine les empreintes ; alors, aucune mémoire n’existe plus, et le malade est gouverné par les seuls caprices du moment, causes possibles d’impulsions dangereuses.
La transformation du passé par les oublis et les fictions de la folie appartient en propre à cette dernière : elle lui interdit la reconnaissance et l’utilisation du présent, à l’inverse des habitudes enregistrées par la mémoire des animaux, qui les guident dans la vie.
La série des réactions consécutives à un choc émotionnel, à une violente douleur morale, nous montre le mécanisme de cette transformation du passé, que nous observons après les émotions et dans la folie. Le choc causal, dans le moment même qu’il nous frappe, ne dure que le temps du présent et comme tel ne dépasse pas nos possibilités de résistance ; mais il peut installer au sein de notre esprit et de notre cœur un souvenir tenace ce dernier, par sa durée, entretient une douleur morale qui, se prolongeant bien au delà du présent, finit par dépasser la mesure de nos forces de résistance. Alors le fil de la mémoire se rompt comme de lui-même ; les [p. 490] évocations trop cruelles sont rejetées dans l’oubli ou cachées par les fictions, et le sujet cherche un refuge dans « la démence contre la douleur morale qui dépasse ses forces ». L’oubli apparaît sous une série de formes diverses, depuis l’exclamation, le geste qui chassent l’image pénible, jusqu’à la maladie mentale, qui en est l’équivalent pour l’aliéné.
La folie est, plus que la perte des souvenirs, la méconnaissance des rapports du présent avec le passé ou le lointain ; elle aperçoit les éléments des choses et non leurs relations logiques ; elle touche par là au génie, qui ne voit et ne recherche que l’essence des idées. Cette notion a conduit Lombroso à ses théories, mais, sans aller jusqu’aux erreurs de celles-ci, il est certain que déjà Schopenhauer s’appuyait sur une vue trop schématique de l’intuition géniale, à qui il interdisait le développement qui comporte une part de logique.
L’isolement du présent, dans la folie, est le produit d’une scission du psychisme, comparable à celle qui aboutit cher les schizophrènes de Bleuler à la perte du contact vital avec la réalité. Comme nous l’avons dit, d’après Schopenhauer lui-même, le présent ainsi isolé se stérilise plus ou moins vite, mais certainement ; les reflux d’actions et de réactions de la vie sont arrêtés également pour lui et n’unissent plus notre monde intérieur avec le monde extérieur (1). La rupture de la continuité du psychisme, à n’importe quel moment, entraîne toujours les mêmes conséquences, si on admet l’unité de ce psychisme, et l’enchaînement de ses fonctions. En 1819, cette idée, d’une nouveauté singulière, ne devait pas encore porter ses fruits, qui ont mûri seulement dans ces dernières années, quand Chaslin a fait connaître chez nous les folies discordantes.
Le chapitre XXXII du supplément au IIIe livre du Monde comme volonté serre de plus près la pensée de l’auteur. Le rôle de la mémoire n’est pas limité au seul classement des souvenirs ; nous voyons les uns disparaître, les autres se consolider par leur répétition : « le cours déjà écoulé de notre vie se confond et se réduit dans le temps ». Les souvenirs sont ordonnés, par l’esprit en état de santé, en vue de leur emploi. Ceux d’entre eux qui nous ont frappés, ou se sont renouvelés à plusieurs reprises, sont évoqués avec la netteté de la perception et entraînent, comme cette dernière, la conviction de la réalité. La folie, le rêve jettent le trouble dans cette conviction : le fou nie un souvenir réel ou admet la vérité d’une fiction. Ces négations et ces illusions empêchent la justice de retenir son témoignage et pourtant il semble capable « de traits d’esprit, de certaines idées sages, parfois de jugements exacts », débris aberrants du présent isolé.
La volonté, par la direction de la mémoire, écarte l’évocation des souvenirs pénibles et n’autorise que l’incorporation des choses agréables ; c’est en dernier ressort l’agent déterminant de la folie ; cette pensée qui semble [p. 491] un paradoxe ne doit plus nous surprendre aujourd’hui ; Chaslin nous a appris (2) que le symbolisme délirant succédait au choix volontaire des symboles, et le fait a été confirmé par une observation récente de Claude (3). C’est donc bien la volonté qui pratique la brèche par où la maladie fait irruption dans l’esprit, et qui produit les lacunes, et les fictions, forçant ainsi les mécanismes naturels d’assimilation et de classement des souvenirs. Par elle la folie devient « le Léthé des souffrances intolérables ; elle a été le dernier recours de la nature saisie d’angoisse, c’est-à-dire de la volonté ». C’est la traduction de la conception moderne de la fuite dans la maladie, que Masselon a exposée sous une autre forme dans sa Thèse sur la Psychologie des déments précoces, dont le trouble intellectuel primordial consiste dans « l’effacement progressif des images mentales, avec fixation automatique d’une représentation déterminée ».
Dans d’autres cas, au lieu de créer des lacunes et des fictions, la maladie donne la prépondérance à un souvenir, auquel l’aliéné s’accroche pour ainsi dire « convulsivement », à l’exclusion de tout autre. L’érotomane ne peut se détacher de l’origine de sa passion ; la victime d’un accident effrayant et soudain reste sous le coup de la frayeur initiale. Mais ce n’est là encore qu’un trouble de l’enchaînement des souvenirs, pivot de la réflexion saine et raisonnable. Ces deux modes de début pourraient servir de base à une classification des formes de la folie.
Lorsque celle-ci est due à des causes somatiques, cérébrales ou viscérales, d’autres considérations interviennent : les fausses perceptions, les illusions sont fréquentes, alors qu’elles sont rares quand l’affection est exclusivement mentale. Si le trouble somatique est considérable, une cause morale minime suffit à déclencher la folie qui aboutit à la paralysie ou à la dépravation du cerveau, et devient incurable à moins de traitement précoce.
La volonté n’est pas paralysée, mais comme affranchie du joug de l’intelligence dans la fureur sans folie de Pinel (folie des actes, monomanie impulsive de ses élèves) ; l’intuition instinctive est le seul moteur qui permet au sujet de n’être pas inerte ; il a conscience de sa conduite et en conserve le souvenir, mais son activité est incoordonnée, et ne dépend que du présent.
L’état de la mémoire et de la volonté va permettre de classer les variétés de folie : le premier groupe comprend les formes caractérisées d’une part par l’oubli et la fiction imaginative, de l’autre par la fixation d’un souvenir exclusif, axe de l’évolution de la maladie ; ces faits appartiennent avant tout aux affections de l’esprit : la folie sans fureur y sera également rangée : le cadre est très large, comme celui de la schizophrénie et des états schizoïdes de Bleuler, comme la démence précoce kraepelinienne des avant-dernières éditions. Les folies d’origine somatique [p. 492] constituent le deuxième groupe, dont le caractère principal est la paralysie, la suspension passive de la volonté, alors qu’au moins au début, elle intervient activement dans le premier groupe. Si nous contrôlons les hypothèses de Schopenhauer par l’observation clinique, nous remarquons que, dans les démences organiques comme dans les psychoses aiguës, c’est bien à une paralysie du psychisme définitive ou transitoire que nous avons à faire sous l’apparence d’affaiblissement démentiel, de confusion ou de stupeur ; là encore la psychiatrie moderne ne contredit pas le philosophe du Monde comme volonté.
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L’Essai sur les Apparitions est postérieur de trente ans à ce livre ; Pinel, Esquirol et ses élèves ont commencé de débrouiller les données du problème. Esquirol fait connaître le premier les hallucinations, symptôme encore imprécis dans le livre de Brierre de Boismont, mais ramené dans les limites de la clinique par Baillarger. Moreau de Tours, dans le Hachich et l’aliénation mentale, étudie l’intrication de la vie de rêve et de la vie réelle dans les intoxications, puis dans la folie… Schopenhauer profitera de ces travaux, qu’il a suivis, pour chercher une explication scientifique des apparitions.
Les images du rêve sont beaucoup plus nettes que celles de la fantaisie ; elles sont vraiment créées par l’intuition, mais sous l’empire d’une force, qui paraît étrangère et surprenante. L’illusion que les objets du rêve appartiennent au monde extérieur est si forte que le réveil est l’occasion d’un choc entre leur prétendue réalité et les objets véritables de l’ambiance.
Le rêve ressemble à la folie, dont il partage l’absence des souvenirs cohérents et raisonnes ; c’est « une courte folie ». Klippel et Régis, en montrant l’importance des états de rêve dans les affections mentales, nous ont offert le meilleur commentaire de cette définition (4).
L’excitation physiologique des centres par l’intermédiaire des nerfs et des vaisseaux est la cause du rêve. « Pendant le sommeil, la chaleur, la respiration, le pouls et presque toutes les sécrétions subissent quelque diminution, les crises salutaires sont fréquentes » : le grand sympathique se libère du système nerveux central pendant la nuit, et ses modifications causent des sensations analogues à celles qui gouvernent les variations d’humeur de la veille. Les sensations de la nuit, élaborées par le cerveau, deviennent les visions sous l’aspect d’images projetées dans le temps et l’espace. L’organe du rêve siège dans les hémisphères cérébraux et non dans le plexus solaire, comme l’ont prétendu les magnétiseurs. Leur erreur repose sur une tendance de notre conscience à reporter dans divers organes, un instant émus par elles, les sensations qui sont en [p. 493] réalité localisées au cerveau : nous disons que nous avons mal au bras, à la jambe, alors que seul le cerveau peut souffrir.
Les derniers livres de Guillaume, de Laignel-Lavastine nous ont fait connaître mieux l’état des systèmes sympathiques pendant le sommeil : le rythme circulatoire et respiratoire est plus lent, la température s ‘abaisse ; les « crises » sont fréquentes, les sueurs et les sécrétions digestives plus faciles. Dans le dédale de ces faits encore hypotéthiques à son époque, Schopenhauer a su choisir la vérité ; quant à son opinion de la genèse des songes, maintenant comme en 1851, elle n’est qu’une explication satisfaisante pour l’esprit.
Les images des rêves ont une valeur symbolique ou n’expriment que le pressentiment de l’avenir, qui se prolongera pendant la veille. Artémidore, dans l’Onéirokriton, divisait déjà les rêves en allégoriques, ou symboliques, et théorématiques, qui montraient directement l’avenir. La formation des symboles obéit à des lois multiples, dont nous ne retiendrons que l’association par l’humour, dont les psychanalystes ont montré les rapports avec l’inconscient.
Les apparitions ne sont que des hallucinations ou des visions de rêve ; elles sont possibles : 1° en premier lieu dans les maladies aiguës, comme les fièvres chaudes, après l’action d’une cause organique ; 2° dans la folie, à condition qu’il existe une lésion cérébrale, mais ce n’est pas la règle ; 3° en dehors de la folie, comme Brierre de Boismont en a rapporté des cas.
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L’Essai sur les Apparitions complète les données générales du Monde comme volonté. La volonté, qui maintient l’unité du psychisme dans l’état de santé, est aussi le premier agent de sa dissociation, après laquelle la vie intuitive et illogique continue isolée, jusqu’à la déchéance définitive. Cette vie est celle de la folie qui s’apparente au rêve ; elle est alimentée par les sensations des sens internes, c’est-à-dire du sympathique.
Cette vaste synthèse n’était possible, au début du XIXe siècle, qu’à un philosophe désintéressé des nombreux problèmes matériels, qui tiennent une si grande place dans l’œuvre d’un Esquirol. Mais ces problèmes matériels, s’ils interdisent à la pensée les grandes envolées, ont au moins le mérite, dans le cas présent, de la ramener sans cesse à la réalité. Une psychologie d’ensemble de la folie est féconde en idées directrices, mais risque de négliger les formes multiples des types cliniques pour les fondre en un seul. Schopenhauer conserve l’attitude d’un philosophe, et s’y conforme, mais les médecins qui suivent la même voie, un Kraepelin ou un Bleuler par exemple, sont tôt ou tard amenés à revenir aux classifications plus précises, qui seules permettent de reconstituer les véritables aspects de la maladie.
Jean Vinchon.
Notes
(1) Minkowski. La schizophrénie et la notion de maladie mentale, in Encéphale, n° 5-6-7, 1921.
(2) Société de Psychologie, in Journal de Psychologie, mai 1922.
(3) Soc. médico-psychologique, avril 1923.
(4) L’idée de la parenté du rêve et de la folie est déjà mentionnée par Cicéron dans plusieurs passages du De Divinatione.
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